Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/167

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retourner contre le vieux tyran et lui dire que Mary Garth était trop bonne d’être à ses ordres. Lorsqu’elle se leva pour prendre le gilet qui était suspendu à un clou, Fred la rejoignit et lui dit :

— Permettez-moi…

— Apportez-le vous-même, missy, et mettez-le là, dit M. Featherstone. Maintenant, sortez jusqu’à ce que je vous rappelle, ajouta-t-il quand il eut le gilet devant lui.

Il avait coutume, lorsqu’il témoignait quelque faveur à une personne, d’assaisonner son plaisir en se montrant particulièrement désagréable pour une autre, et Mary était toujours là pour lui offrir cet assaisonnement. Il prit lentement un trousseau de clefs dans la poche du gilet et tira lentement aussi une botte d’étain de dessous ses couvertures.

— Vous vous attendez à ce que je vous donne une petite fortune, eh ? dit-il en le regardant et en s’arrêtant au moment de soulever le couvercle de la boîte.

— Aucunement, monsieur… Vous avez été assez bon, l’autre jour, pour parler de me faire un petit présent, sans quoi je n’aurais certainement pensé à rien de semblable.

Le vieillard, de ses mains aux fortes veines, toucha nombre de billets de banque, les replaçant ensuite les uns sur les autres, tandis que Fred, appuyé au dossier de sa chaise, affectait l’indifférence. Enfin, le vieil avare le fixa encore par-dessus ses lunettes et lui présenta un petit paquet de billets. Il n’y en avait que cinq, ainsi que Fred s’en rendit compte, ne voyant d’ailleurs que l’extrémité des billets dont il ignorait la valeur, mais dont chacun, il est vrai, pouvait valoir cinquante livres. Il les prit en disant :

— Je vous suis très obligé, monsieur.

Et il allait les plier sans paraître s’inquiéter de ce qu’ils valaient. Mais M. Featherstone ne l’entendait pas ainsi.

— Allons, ne croyez-vous pas qu’il vaille la peine de les