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les joints étoient inclinés, étoient non-seulement retenues par les angles du mur, faits de maçonnerie de brique en liaison, mais encore par des traverses de pareille maçonnerie, tant dans l’intérieur du mur qu’à l’extérieur.

La seconde espèce étoit celle en liaison appelée insertum, & dont les joints étoient horizontaux & verticaux : c’étoit la plus solide, parce que ses joints verticaux se croisoient, ensorte qu’un ou deux joints se trouvoient au milieu d’une pierre, ce qui s’appeloit & s’appelle encore maintenant maçonnerie en liaison.

Cette dernière se subdivise en deux, dont l’une étoit appelée simplement insertum, qui avoit toutes les pierres égales par leurs paremens ; l’autre, étoit la structure des Grecs, dans laquelle se trouve l’une & l’autre ; mais les paremens des pierres étoient inégaux : ensorte que deux joints perpendiculaires se rencontroient au milieu d’une pierre.

Le second genre étoit celui de pierre brute ; il y en avoit de deux espèces, dont l’une étoit appelée, comme la dernière, la structure des Grecs, mais qui différoit en ce que les pierres n’en étoient point taillées, à cause de leur dureté, que les liaisons n’étoient point régulières, & qu’elles n’avoient point de grandeur réglée.

Cette espèce se subdivisoit encore en deux ; l’une que l’on appeloit isodomum, parce que les assises étoient d’égale hauteur ; l’autre pseudisodomum, parce que les assises étoient d’inégale hauteur.

L’autre espèce, faite de pierres brutes, étoit appelée amplecìon, dans laquelle les assises n’étoient point déterminées par l’épaisseur des pierres ; mais la hauteur de chaque assise étoit faite de plusieurs, si le cas y échéoit, & l’espace d’un parement à l’autre étoit rempli de pierres jetées à l’aventure, sur lesquelles on versoit du mortier que l’on enduisoit uniment ; & quand cette assise étoit achevée, on en recommençoit une autre par dessus : c’est ce que les Limousins appeloient des arrases, & que Vitruve nomme erecta coria.

Le troisième genre appelé revinctum, étoit composé de pierres taillées, posées en liaison & cramponnées ; ensorte que chaque joint vertical se trouvoit au milieu d’une pierre, tant dessus que dessous, entre lesquelles on mettoit des cailloux & d’autres pierres jetées à l’aventure, mêlées de mortier.

Il y avoit encore deux manières anciennes de bâtir ; la première étoit de poser les pierres les ânes sur les autres, sans aucune liaison ; mais alors il falloit que leurs surfaces fussent bien unies & bien planes. La seconde étoit de poser ces mêmes pierres les unes sur les autres, & de placer entre chacune d’elles une lame de plomb d’environ une ligne d’épaisseur.

Ces deux manières étoient fort solides, à cause du poids de la charge d’un grand nombre de ces pierres, qui leur donnoit assez de force pour se soutenir ; mais les pierres étoient sujettes, par ce même poids, à s’éclater & à se rompre dans leurs angles, quoiqu’il y ait, selon Vitruve, des bâtimens fort anciens où de très-grandes pierres avoient été posées horizontalement, sans mortier ni plomb, & dont les joints n’étoient point éclatés, mais étoient demeurés presque invisibles par la jonction des pierres, qui avoient été taillées si juste & se touchoient en un si grand nombre de parties, qu’elles s’étoient conservées entières.

Ce qui peut très-bien arriver, lorsque les pierres sont démaigries, c’est-à-dire, plus creuses au milieu que vers les bords, parce que lorsque le mortier se sèche, les pierres se rapprochent, & ne portent ensuite que sur l’extrémité du joint ; & ce joint n’étant pas assez fort pour le fardeau, ne manque pas de s’éclater. Mais les maçons qui ont travaillé au Louvre, ont imaginé de fendre les joints des pierres avec la scie, à mesure que le mortier se séchoit, & de remplir lorsque le mortier avoit fait son effet.

On doit remarquer que par-là un mur de cette espèce a d’autant mpins de solidité, que l’espace est grand depuis le démaigrissement jusqu’au parement de devant, parce que ce mortier mis après coup n’étant compté pour rien, ce même espace est un moins dans l’épaisseur du mur, mais le charge d’autant plus.

Palladio rapporte dans son premier livre, qu’il y avoit anciennement six manières de faire les murailles ; la première en échiquier, la seconde de terre cuite ou de brique, la troisième de ciment fait de cailloux de rivière ou de montagne, la quatrième de pierres incertaines ou rustiques, la cinquième de pierres de taille, & la sixième de remplage.

Nous avons expliqué ci-dessus la manière de bâtir en échiquier, rapportée par Palladio.

La deuxième manière étoit de bâtir ën liaison, avec des carreaux de brique ou de terre cuite, grands ou petits. La plus grande partie des édifices de Rome connue, la rotonde, les thermes de Dioclétien & beaucoup d’autres édifices, sont bâtis de cette manière.

La troisième manière étoit de faire les deux faces du mur, de carreaux de pierres ou de briques en liaison ; le milieu, de ciment ou de cailloux de rivière paîtris avec du mortier, & de placer de trois pieds en trois pieds de hauteur, trois rangs de brique en liaison ; c’est-à-dire, le premier rang vu sur le petit côté, le second vu sur le grand côté, & le troisième vu aussi sur le petit côté.

Les murailles de la ville de Turin sont bâties de cette manière ; mais les garnis sont faits de gros cailloux de rivière cassés par le milieu, mêlés de mortier, dont la face unie est placée du côté du mur de face. Les murs des arènes à Vérone sont aussi construits de cette manière avec un garni de ciment, ainsi que ceux de plusieurs autres bâtimens antiques.