Page:Encyclopédie méthodique - Arts et métiers mécaniques, T04.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
270
MAÇ MAÇ


précédemment, absorberoit ou amortiroit la qualité de la chaux qui compose le mortier.

D’ailleurs, si on ne les écarrissoit pas au moins avec la hachette, les interstices de différentes grandeurs produiroient une inégalité dans l’emploi du mortier, & un entassement inégal dans la construction du mur.

La cinquième se fait de blocage, en latin structura ruderaria, c’est-à-dire, de menues pierres qui s’emploient avec du mortier dans les fondations, & avec du plâtre dans les ouvrages hors de terre.

C’est-là, selon Vitruve, une très bonne manière de bâtir, parce que, selon lui, plus il y a de mortier, plus les pierres en sont abreuvées, & plus les murs sont solides quand ils sont secs. Mais il faut remarquer aussi que plus il y a de mortier, plus le bâtiment est sujet à tasser à mesure qu’il se sèche ; trop heureux s’il tasse également, ce qui est douteux. Cependant, on ne laisse pas que de bâtir souvent de cette manière en Italie, où la pozzolane est d’un grand secours pour cette construction.

Des Murs en général.

La qualité du terrain, les différens pays où l’on se trouve, les matériaux que l’on a, & d’autres circonstances que l’on ne sauroit prévoir, doivent décider de la manière de bâtir.

Celle où l’on emploie la pierre est sans doute la meilleure ; mais comme il y a des endroit où elle est fort chère, d’autres où elle est très-rare, & d’autres encore où il ne s’en trouve point du tout, on est obligé alors d’employer ce que l’on trouve, en observant cependant de pratiquer dans l’épaisseur des murs, sous les retombées des voûtes, sous les poutres, dans les angles des bâtimens & dans les endroits qui ont besoin de solidité, des chaînes de pierre ou de grais si on en peut avoir, ou d’avoir recours à d’autres moyens pour donner aux murs une fermeté suffisante.

Murs en élévation.

Il faut observer plusieurs choses en bâtissant. Premièrement, que les premières assises au rez-de-chaussée soient en pierre dure, même jusqu’à une certaine hauteur, si l’édifice est très-élévé.

Secondement, que celies qui sont sur un même rang d’assises soient de même qualité, afin que le poids supérieur, chargeant également dans toute la surface, trouve aussi une résistance égale sur la partie supérieure.

Troisièmement, que toutes les pierres, moilons, briques & autres matériaux, soient bien unis ensemble & posés bien de niveau.

Quatrièmement, lorsqu’on emploie le plâtre, de laisser une distance entre les arrachemens & les chaînes des pierres, afin de procurer à la maçonnerie le moyen de faire son effet, le plâtre étant sujet à se renfler & à pousser les premiers jours qu’il est employé ; & lors du ravalement général, on remplit ces interstices.

Cinquièmement enfin, lorsque l’on craint que les murs ayant beaucoup de charge, soit par leur très-grande hauteur, soit par la multiplicité des planchers, des voûtes, &c. qu’ils portent, ne deviennent trop foibles & n’en affaissent la partie inférieure, de faire ce qu’on a fait au Louvre, qui est de pratiquer dans leur épaisseur des arcades ou décharges, appuyées sur des chaînes de pierres ou jambes sous poutres, qui en soutiennent la pesanteur.

Les anciens, au lieu d’arcades, se servoient de longues pièces de bois d’olivier qu’ils posoient sur toute la longueur des murs ; ce bois ayant seul, dit-on, la vertu de s’unir avec le mortier ou le plâtre, sans se pourrir.

Des Murs de face & de refend.

Lorsque l’on construit des murs de face, il est beaucoup mieux de faire ensorte que toutes les assises soient d’une égale hauteur, ce qui s’appelle bâtir à assise égale, que les joints des paremens soient le plus serrés qu’il est possible.

C’est à quoi les anciens apportoient beaucoup d’attention ; car, comme nous l’avons vu, ils appareilloient leurs pierres & les posoient les unes sur les autres sans mortier, avec une si grande justesse, que les joints devenoient presque imperceptibles, & que leur propre poids suffisoit seul pour les rendre fermes. Quelques-uns croient qu’ils laissoient sur tous les paremens de leurs pierres environ un pouce de plus, qu’ils retondoient lors du ravalement total ; ce qui paroît destitué de toute vraisemblance, par la description des anciens ouvrages dont l’Histoire fait mention.

D’ailleurs, l’appareil étant une partie très-essentielle dans la construction, il est dangereux de laisser des joints trop larges, non-seulement parce qu’ils sont désagréables à la vue, mais encore parce qu’ils contribuent beaucoup au défaut de solidité, soit parce qu’en liant des pierres tendres ensemble, il se fait d’autant plus de cellules dans leurs pores, que le mortier dont on se sert est d’une nature plus dure ; soit parce que le bâtiment est sujet à tasser davantage, & par conséquent à s’ébranler ; soit encore parce qu’en employant du plâtre, qui est d’une consistance beaucoup plus molle, & pour cette raison plus tôt pulvérisée par le poids de l’édifice, les arêtes des pierres s’éclatent à mesure qu’elles viennent à se toucher.

C’est pour cela que, dans les bâtimens de peu d’importance, où il s’agit d’aller vite, on les calle avec des lattes, entre lesquelles on fait couler du mortier, & on les jointoie, ainsi qu’on peut le remarquer dans presque tous les édifices modernes.

Dans ceux qui méritent quelqu’attention, on se sert au contraire de lames de plomb, ainsi qu’on l’a pratiqué au péristile du Louvre, aux châteaux de Clagny, de Maisons & autres.