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resserrée ; & la pierre ne pouvant résister à cet effort, se fend & tombe par éclats. Ainsi, plus la pierre est composée de parties argilleuses & grasses, plus elle doit participer d’humidité, & par conséquent être sujette à la gelée.

Quelques-uns croient que la pierre ne se détruit pas seulement à la gelée, mais qu’elle se mouline ou s’égrène encore à la lune : ce qui peut arriver, suivant ce préjugé, à de certaines espèces de pierres, dont les rayons de la lune peuvent dissoudre les parties les moins compactes. Mais il s’ensuivroit delà que ses rayons seraient humides, & que venant à s’introduire dans les pores de la pierre, ils seroient cause de la séparation de ses parties, qui, tombant insensiblement en parcelles, la feroit paraître moulinée.

Maçonnerie en moellons de meulière & autres de terre.

La maçonnerie en moellons de meulière est d’un grand usage en France.

Cette espèce de pierre est très-poreuse, & s’abreuve aisément des agens qui lui servent de liaison ; ce qui doit nécessairement faire une bonne construction : mais la pierre meulière est trop dure pour être taillée ; elle se casse par éclats & ne peut faire parement ; elle s’emploie très-bien & de préférence dans les fondations & dans l’intérieur des murs.

Il est une autre espèce de moellons en terre crue ou cuite, dont on fait usage principalement dans les pays où la pierre est rare.

La première est faite d’une argile grasse & ferme ; on en forme des moellons de sept ou huit pouces sur douze à quinze pouces, & quatre à cinq pouces d’épaisseur, soit à la main, soit au moule. On les pétrit & on les fait sécher simplement à l’air, & non au feu ou au grand soleil, qui les feroient gercer & fendre. Etant bien séchés, ce qui demande plus ou moins de temps, suivant la grosseur de ces blocs, on en construit des murs liaisonnés & d’à-plomb, avec un mortier de pareille terre.

Cette sorte de bâtisse n’est point propre à porter un grand fardeau, aussi ne l’emploie-t-on que dans les maisons des champs très-peu élevées & couvertes de chaume, ou dans des lieux privés d’aisance.

L’autre espèce de moellons en terre cuite ou en brique, dont il sera parlé plus particulièrement ci-après, fait une bâtisse durable & solide. Elle s’emploie dans plusieurs provinces de France, où la bonne pierre n’est pas commune.

Maçonnerie en hourdage ou colombage.

Les hourdages sont des parties de cloisons garnies de plâtre, mortier ou terre.

Les colombages sont des hourdages recouverts de mortier ou de plâtre.

Cette manière de bâtir est peu dispendieuse, mais aussi peu solide, & ne s’emploie que dans de légers ouvrages.

Les anciens s’en servoient dans la construction de leurs cabanes ; ils faisoient des hourdages avec des branchages & de la terre ; ils y mêloient quelquefois de la paille ou du foin haché, comme cela se pratique encore dans quelques pays.

Les meilleurs hourdages sont construits en petites pierres ou plâtras, entrelacés de lattes fixées sur les bois de charpente, qu’on recouvre ensuite de mortier ou de plâtre.

Des carrièrres & des pierres qu’on en tire.

On appelle communément carrières des lieux creusés sous terre, où la pierre prend naissance. C’est delà qu’on tire celle dont on se sert pour bâtir, & cela par des ouvertures en forme de puits, comme on en voit aux environs de Paris ; ou de plain-pied, comme à S. Leu, Trocy, Maillet, & ailleurs ; ce qui s’appelle encore carrière découverte.

La pierre se trouve ordinairement dans la carrière disposée par bancs, dont l’épaisseur change selon les lieux & la nature de la pierre. Les ouvriers qui la tirent, se nomment carriers.

Il faut avoir pour principe dans les bâtimens, de poser les pierres sur leurs lits, c’est-à-dire, dans la même situation qu’elles se sont trouvées placées dans la carrière, parce que, selon cette situation, elles sont capables de résister à de plus grands fardeaux ; au lieu que posées sur un autre sens, elles sont très-sujettes à s’éclater, & n’ont pas, à beaucoup près, tant de force.

Les bons ouvriers connoissent du premier coup d’œil le lit d’une pierre ; mais si l’on n’y prend garde, ils ne s’assujettissent pas toujours à la poser comme il faut.

La pierre dure supportant mieux que toute autre un poids considérable, ainsi que les mauvais temps, l’humidité, la gelée, &c. il faut prendre la précaution de la placer de préférence dans les endroits exposés à l’air, réservant celle que l’on aura reconnue moins bonne pour les fondations & autres lieux à couvert.

C’est de la première que l’on emploie le plus communément dans les grands édifices, sur-tout jusqu’à une certaine hauteur. La meilleure est la plus pleine, serrée, la moins coquilleuse, la moins remplie de moie ou de tendre, de veines, autrement de trous ou molière, lorsqu’elle est d’un grain fin & uni, & lorsque les éclats sont sonores & se coupent net.

La pierre dure & tendre se tire des carrières par gros quartiers que l’on débite sur l’atelier, suivant le besoin que l’on en a.

Les plus petits morceaux servent de libage ou de moellon, à l’usage des murs de fondation, de refends, mitoyens, &c. on les unit les uns aux autres par le secours du mortier, fait de ciment ou de sable broyé avec de la chaux, ou bien encore avec du plâtre, selon le lieu où l’on bâtit.

Il faut avoir grand soin d’en ôter tout le bouzin,