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telligence consommée, pour remédier à toutes les difficultés qui peuvent se rencontrer dans l’exécution.

C’est-là ordinairement ce qui fait la science & le bon ordre de cette partie, ce qui détermine la dépense d’un bâtiment, & le temps qu’il faut pour l’élever. Par la négligence de ces différentes observations & le désir d’aller plus vîte, il résulte souvent plusieurs inconvéniens.

On commence d’abord par fouiller une partie du terrain, sur laquelle on construit ; alors l’atelier se trouve surchargé d’équipages & d’ouvriers de différentes espèces, qui exigent chacun un ordre particulier. D’ailleurs, ces ouvriers, quelquefois en grand nombre, appartenant à plusieurs entrepreneurs, dont les intérêts sont différens, se nuisent les uns aux autres, & par conséquent aussi à l’accélération des ouvrages.

Un autre inconvénient est, que les fouilles & les fondations étant faites en des temps & des saisons différentes, il arrive que toutes les parties d’un bâtiment où l’on a préféré la diligence à la solidité, ayant été bâties à diverses reprises, s’affaissent inégalement, & engendrent des sur-plombs, lézardes, &c.

Le moyen d’user d’économie à l’égard du transport des terres, est non-seulement de les transporter le moins loin qu’il est possible, mais encore d’user des charrois les plus convenables ; ce qui doit en décider, est la rareté des hommes, des bêtes de somme ou de voiture, le prix des fourrages, la situation des lieux, & d’autres circonstances encore que l’on ne sauroit prévoir ; car lorsqu’il y a trop loin, les hottes, brouettes, bauveaux, ne peuvent servir.

Lorsque l’on bâtit sur une demi-côte, les tombereaux ne peuvent être mis en usage, à moins que, lorsqu’il s’agit d’un bâtiment de quelque importance, on ne pratique des chemins en zigzag pour adoucir les pentes.

Cependant la meilleure manière, lorsqu’il y a loin, est de se servir des tombereaux qui contiennent environ dix à douze pieds cubes de terre chacun ; ce qui coûte beaucoup moins, & est beaucoup plus prompt que si l’on employoit dix ou douze hommes avec des hottes ou brouettes, qui ne contiennent guère chacune qu’un pied cube.

Il faut observer de payer les ouvriers préférablement à la toise, tant pour éviter les détails embarrassans que parce qu’ils vont beaucoup plus vîte, les ouvrages traînent moins en longueur, & les fouilles peuvent se trouver faites de manière à pouvoir élever des fondement hors de terre avant l’hiver.

Lorsque l’on aura beaucoup de terre à remuer, il faudra obliger les entrepreneurs à laisser des témoins ou mottes de terre de la hauteur du terrain, sur le tas jusqu’à la fin des travaux, afin qu’ils puissent servir à toiser les surcharges & vidanges des terres que l’on aura été obligé d’apporter ou d’enlever, selon les circonstances.

Les fouilles pour les fondations des bâtimens se font de deux manières : l’une dans toute leur étendue, c’est-à-dire, dans l’intérieur de leurs murs de face : lorsqu’on a dessein de faire des caves souterraines, aqueducs, &c. on fait enlever généralement toutes les terres jusqu’au bon terrain : l’autre seulement par partie, lorsque n’ayant besoin ni de l’un ni de l’autre, on fait seulement des tranchées, de l’épaisseur des murs qu’il s’agit de fonder, que l’on trace au cordeau sur le terrain, & que l’on marque avec des repaires.

Des différentes espèces de terrains.

Quoique la diversité des terrains soit très-grande, on peut néanmois la réduire à trois espèces principales ; la première est celle de tuf ou de roc, que l’on connoît facilement par la dureté, & pour lesquels on est obligé d’employer le pic, l’aiguille, le coin, la masse, & quelquefois la mine : c’est une pierre dont il faut prendre garde à la qualité.

Lorsqu’on emploie la mine pour la tirer, on se sert d’abord d’une aiguille qu’on appelle ordinairement trépan, bien acéré par un bout, & de six à sept pieds de longueur, manœuvré par deux hommes, avec lequel on fait un trou de quatre ou cinq pieds de profondeur, capable de contenir une certaine quantité de poudre.

Cette mine chargée, on bouche le trou d’un tampon chassé à force, pour faire faire plus d’effet à la poudre ; on y met ensuite le feu par le moyen d’un morceau d’amadou, afin de donner le temps aux ouvriers de s’éloigner ; la mine ayant ébranlé & écarté les pierres, on en fait le déblai, & on recommence l’opération toutes les fois qu’il est nécessaire.

La seconde est celle de rocaille ou de sable, pour lesquels on n’a besoin que du pic & de la pioche.

L’une, dit M. Bélidor, n’est autre chose qu’une pierre morte mêlée de terre, qu’il est beaucoup plus difficile de fouiller que les autres ; aussi le prix en est-il à-peu près du double.

L’autre se divise en deux espèces ; l’une qu’on appelle sable ferme, sur lequel on peut fonder solidement ; l’autre sable mouvant, sur lequel on ne peut fonder qu’en prenant des précautions contre les accidens qui pourroient arriver.

On les distingue ordinairement par la terre que l’on retire d’une sonde de fer, dont le bout est fait en tarière, & avec laquelle on a percé le terrain. Si la sonde résiste & a de la peine à entrer, c’est une marque que le sable est dur ; si au contraire elle entre facilement, c’est une marque que le sable est mouvant. Il ne faut pas confondre ce dernier avec le sable bouillant, appelé ainsi parce qu’il en sort de l’eau lorsque l’on marche dessus, puisqu’il arrive souvent que l’on peut fonder dessus très-solidement, comme on le verra dans la suite.

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