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La troisième est de terres franches, qui se divise en deux espèces ; les unes, que l’on appelle terres hors d’eau, se tirent & se transportent sans difficultés ; les autres, qu’on appelle terres dans l’eau, coûtent souvent beaucoup, par les peines que l’on a de détourner les sources, ou par les épuisemens que l’on est obligé de faire.

Il y en a de quatre sortes, la terre ordinaire, la terre grasse, la terre glaise, & la terre de tourbe.

La première se trouve dans tous les lieux secs & élevés.

La seconde, que l’on tire des lieux bas & profonds, est le plus souvent composée de vase & de limon qui n’ont aucune solidité.

La troisième, qui se tire indifféremment des lieux bas & élevés, peut recevoir des fondemens solides, sur-tout lorsqu’elle est ferme, que son banc a beaucoup d’épaisseur, & qu’elle est par-tout d’une égale consistance.

La quatrième est une terre grasse, noire & bitumineuse, qui se tire des lieux aquatiques & marécageux, & qui étant sèche se consume au feu.

On ne peut fonder solidement sur un pareil terrain, sans le secours de l’art & sans des précautions que l’on connoîtra par la suite.

Une chose très-essentielle, lorsque l’on voudra connoître parfaitement un terrain, est de consulter les gens du pays : l’usage & le travail continuel qu’ils ont fait depuis long-temps dans les mêmes endroits, leur ont fait faire des remarques & des observations dont il est bon de prendre connoissance.

La solidité d’un terrain, dit Vitruve, se connoît par les environs, soit par les herbes qui en naissent, soit par des puits, citernes, ou par des trous de sonde.

Une autre preuve encore de sa solidité, est lorsque laissant tomber de fort haut un corps très-pesant, on s’apperçoit qu’il ne résonne ni ne tremble ; ce que l’on peut juger par un tambour placé près de l’endroit où doit tomber ce corps, ou un vase plein d’eau dont le calme n’en est pas troublé.

Mais avant que d’entrer dans des détails circonstariciés sur la manière de fonder dans les différens terrains, nous dirons quelque chose de la manière de planter les bâtimens.

Disposition des bâtimens.

L’expérience & la connoissance de la géométrie, sont des choses également nécessaires pour cet objet ; c’est par le moyen de cette derniere, que l’on peut tracer sur le terrain les tranchées des fondations d’un bâtiment, qu’on aura soin de placer d’alignement aux principaux points de vue qui en embellissent l’aspect : cette observation est si essentielle, qu’il y a des occasions où il seroit mieux de préférer les alignemens directs des principales issues, à l’obliquité de la situation du bâtiment.

Il faut observer de donner des dessins aux traits, les coter bien exactement, marquer l’ouverture des angles, supprimer les saillies au dessus des fondations, exprimer les empatemens nécessaires pour le retour des corps saillans ou rentrans, intérieurs ou extérieurs, & prendre garde que les mesures particulières s’accordent avec les mesures générales.

Alors, pour faciliter les opérations sur le terrain, on place, à quelque distance des murs de face, des pièces de bois bien écarries, que l’on enfonce assez avant dans la terre, & qui servent à recevoir des cordeaux bien tendus, pour marquer l’épaisseur des murs, & la hauteur des assises. On aura soin de les entretenir par des espèces d’entre-toises, non-seulement pour les rendre plus fermes, mais afin qu’ils puissent aussi entretenir les cordeaux à demeure tels qu’on les a placés, selon les cotes du plan.

Il ne sera pas inutile encore, lorsque les fondations seront hors de terre, de recommencer les opérations d’alignement, afin que les dernières puissent servir de preuves aux premières, & par-là s’assurer de ne s’être point trompé.

Des fondemens en général.

Les fondemens exigent beaucoup d’attention pour parvenir à leur donner une solidité convenable. C’est ordinairement de-là que dépend tout le succès de la construction : car, dit Palladio, les fondemens étant la base & le pied du bâtiment, ils sont difficiles à réparer ; & lorsqu’ils se détruisent, le reste du mur ne peut plus subsister.

Avant que de fonder, il faut considérer si le terrain est solide : s’il ne l’est pas, il faudra peut-être fouiller un peu dans le sable ou dans la glaise, & suppléer ensuite au défaut de la nature par le secours de l’art. Mais, dit Vitruve, il faut fouiller autant qu’il est nécessaire jusqu’au bon terrain, afin de soutenir la pesanteur des murs, bâtir ensuite le plus solidement qu’il sera possible, & avec la pierre la plus dure ; mais avec plus de largeur qu’au rez-de-chaussée. Si ces murs ont des voûtes sous terre, il leur faudra donner encore plus d’épaisseur.

Il faut avoir soin, dit encore Palladio, que le plan de la tranchée soit de niveau, que le milieu du mur soit au-milieu de la fondation, & bien perpendiculaire, & observer cette méthode jusqu’au faîte du bâtiment ; lorsqu’il y a des caves ou souterrains, qu’il n’y ait aucune partie du mur ou colonne qui porte à faux, que le plein porte toujours sur le plein, & jamais sur le vuide, & cela afin que le bâtiment puisse tasser bien également. Cependant, dit-il, si on vouloit les faire à-plomb, ce ne pourroit être que d’un côté, & dans l’intérieur du bâtiment, étant entretenues par les murs de refend & par les planchers.

L’empattement d’un mur que Vitruve appelle stéréobate, doit, selon lui, avoir la moitié de son épaisseur. Palladio donne aux murs de fondation le