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double de leur épaisseur supérieure ; & lorsqu’il n’y a point de cave, la sixième partie de leur hauteur : Scamozzi leur donne le quart au plus, & le sixième au moins ; quoiqu’aux fondations des tours, il leur ait donné trois fois l’épaisseur des murs supérieurs. Philibert de Lorme, qui semble être fondé sur le sentiment de Vitruve, leur donne aussi la moitié ; les Mansard aux Invalides & à Maisons, leur ont donné la moitié ; Bruant à l’hôtel de Belle-Isle, leur a donné les deux tiers.

En général, l’épaisseur des fondemens doit se régler, comme dit Palladio, sur leur profondeur, la hauteur des murs, la qualité du terrain, & celle des matériaux que l’on y emploie ; c’est pourquoi n’étant pas possible d’en régler au juste l’épaisseur, c’est, ajoute cet auteur, à un habile architecte qu’il convient d’en juger.

Lorsque l’on veut, dit-il ailleurs, ménager la dépense des excavations & des fondemens, on pratique des piles que l’on pose sur le bon fond, & sur lesquelles on bande des arcs ; il faut faire attention alors de faire celle des extrémités plus fortes que celles du milieu, parce que tous ces arcs, appuyés les uns contre les autres, tendent à pousser les plus éloignés ; & c’est ce que Philibert de Lorme a pratiqué au château de Saint-Maur, lorsqu’en fouillant pour poser les fondations de ce château, il trouva des terres rapportées de plus de quarante pieds de profondeur.

Il se contenta alors de faire des fouilles d’un diamètre convenable à l’épaisseur des murs, & fit élever sur le bon terrain des piles éloignées les unes des autres d’environ douze pieds, sur lesquelles il fit bander des arcs en plein ceintre, & ensuite bâtir dessus comme à l’ordinaire.

Léon Baptiste Alberti, Scamozzi, & plusieurs autres, proposent de fonder de cette manière dans les édifices où il y a beaucoup de colonnes, afin d’éviter la dépense des fondemens & des fouilles au dessous des entre-colonnemens ; mais ils conseillent en même temps de renverser les arcs, de manière que leurs extrados soient poses sur le terrain, ou sur d’autres arcs bandés en sens contraire, parce que, disent-ils, le terrain où l’on fonde pouvant se trouver d’inégale consistance, il est à craindre que, dans la suite, quelque pile venant à s’affaisser, ne causât une rupture considérable aux arcades, & par conséquent aux murs élevés dessus.

Ainsi, par ce moyen, si une des piles devient moins assurée que les autres, elle se trouve alors arcboutée par des arcades voisines, qui ne peuvent céder étant appuyées sur les terres qui sont dessous.

Il faut encore observer, dit Palladio, de donner de l’air aux fondations des bâtimens par des ouvertures qui se communiquent ; d’en fortifier tous les angles, d’éviter de placer trop près d’eux des portes & des croisées, étant autant de vides qui en diminuent la solidité.

Il arrive souvent, dit M. Bélidor, que lorsque l’on vient à fonder, on rencontre des sources qui nuisent souvent beaucoup aux travaux. Quelques-uns prétendent les éteindre en jetant dessus de la chaux vive mêlée de cendre ; d’autres remplissent, disent-ils, de vif-argent les trous par où elles sortent, afin que son poids les oblige à prendre un autre cours.

Ces expédiens étant fort douteux, il vaut beaucoup mieux prendre le parti de faire un puits au-delà de la tranchée, & d’y conduire les eaux par des rigoles de bois ou de briques couvertes de pierres plates, & les élever ensuite avec des machines : par ce moyen on pourra travailler à sec.

Néanmoins, pour empêcher que les sources ne nuisent dans la suite aux fondemens, il est bon de pratiquer dans la maçonnerie des espèces de petits aqueducs, qui leur donnent un libre cours.

Des fondemens sur un bon terrain.

Lorsque l’on veut sonder sur un terrain solide, il ne se trouve pas alors beaucoup de difficultés à surmonter ; on commence d’abord par préparer le terrain, comme nous l’avons vu précédemment, en faisant des tranchées de la profondeur & de la largeur que l’on veut faire les fondations.

On passe ensuite dessus une assise de gros libages, ou quartiers de pierres plates à bain de mortier ; quoique beaucoup de gens les posent à sec, ne garnissant de mortier que leurs joints. Sur cette première assise, on en élève d’autres en liaison à carreau & boutisse alternativement.

Le milieu du mur se remplit de moellon mêlé de mortier : lorsque ce moellon est brut, on en garnit les interstices avec d’autres plus petits que l’on enfonce bien avant dans les joints, & avec lesquels on arrose les lits.

On continue de même pour les autres assises, observant de conduire l’ouvrage toujours de niveau dans toute sa longueur, & des retraites ; on talude en diminuant jusqu’à l’épaisseur du mur au rez-de-chaussée.

Quoique le bon terrain se trouve le plus souvent dans les lieux élevés, il arrive cependant qu’il s’en trouve d’excellens dans les lieux aquatiques & profonds, & sur lesquels on peut fonder solidement, & avec confiance ; tels que ceux de gravier, de marne, de glaise, & quelquefois même sur le sable bouillant, en s’y conduisant cependant avec beaucoup de prudence & d’adresse.

Des fondemens sur le roc.

Quoique les fondemens sur le roc paraissent les plus faciles à faire par la solidité du fond, il n’en faut pas pour cela prendre moins de précautions. C’est, dit Vitruve, de tous les fondemens les plus solides, parce qu’ils sont déja fondés par le roc même. Ceux qui se font sur le tuf & la seareute, ne le sont pas moins, dit Palladio, parce que ces terrains sont naturellement fondés eux-mêmes.

Avant que de commencer à fonder sur le roc,