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il faut, avec le secours de la sonde, s’assurer de la solidité, & s’il ne se trouveroit pas dessous quelque cavité qui, par le peu d’épaisseur qu’elle laisseroit au roc, ne permettroit pas d’élever dessus un poids considérable de maçonnerie ; alors il faudroit placer dans ces cavités des piliers de distances à autres, & bander des arcs pour soutenir le fardeau que l’on veut élever, & par-là éviter ce qui est arrivé en bâtissant le Val-de-Grace, où, lorsqu’on eut trouvé le roc, on crut y asseoir solidement les fondations, mais le poids fit fléchir le ciel d’une carrière qui anciennement avoit été fouillée dans cet endroit ; de sorte qu’on fut obligé de percer ce roc, & d’établir par dessous œuvre dans la carrière des piliers pour soutenir l’édifice.

Il est arrivé une chose à peu près semblable à Abbeville, lorsque l’on eut élevé les fondemens de la manufacture de Vanrobais. Ce fait est rapporté par M. Briseux, dans son traité des maisons de campagne, & par M. Blondel, dans son architecture françoise. Ce bâtiment étant fondé dans sa totalité, il s’enfonça également d’environ six pieds en terre : ce fait parut surprenant, & donna occasion de chercher le sujet d’un événement si subit & si général. L’on découvrit enfin, que le même jour on avoit achevé de percer un puits aux environs, & que cette ouverture ayant donné de l’air aux sources, avoit donné lieu au bâtiment de s’affaisser. Alors on se détermina à le combler, ce que l’on ne put faire malgré la quantité de matériaux que l’on y jeta ; de manière que l’on fut obligé d’y enfoncer un rouet de charpente de la largeur du puits, & qui n’étoit point percé à jour. Lorsqu’il fut descendu jusqu’au fond, on jeta dessus de nouveaux matériaux jusqu’à ce qu’il fût comblé : mais en le remplissant, on s’apperçut qu’il y en étoit entré une bien plus grande quantité qu’il ne sembloit pouvoir en contenir. Cependant, lorsque cette opération fut finie, on continua le bâtiment avec succès, & il subsiste encore aujourd’hui.

Jean-Baptiste Alberti & Philibert de Lorme, rapportent qu’ils se sont trouvés en pareil cas dans d’autres circonstances.

Lorsque l’on sera assuré de la solidité du roc, & que l’on voudra bâtir dessus, il faudra y pratiquer des assises par ressauts, en montant ou descendant, selon la forme du roc, leur donnant le plus d’assiette qu’il est possible.

Si le roc est trop uni, & qu’il soit à craindre que le mortier ne puisse pas s’agraffer & faire bonne liaison, on aura soin d’en piquer les lits avec le têtu, ainsi que celui des pierres qu’on posera dessus, afin que cet agent entrant en plus grande quantité dans ces cavités, puisse consolider cette nouvelle construction.

Lorsque l’on y adossera de la maçonnerie, on pourra réduire les murs à une moindre épaisseur, en pratiquant toujours des arrachemens piqués dans leurs lits, pour recevoir les harpes des pierres.

Lorsque la surface du roc est très-inégale, on peut s’éviter la peine de le tailler, en employant toutes les menues pierres qui embarrassent l’âtelier, & qui avec le mortier remplissent très-bien les inégalités du roc.

Cette construction étoit très-estimée des anciens, & souvent préférée dans la plupart des bâtimens. M. Bélidor en fait beaucoup de cas, & prétend que lorsqu’elle s’est une fois endurcie, elle forme une masse plus solide & plus dure que le marbre ; & que par conséquent elle ne peut jamais s’affaisser, malgré les poids inégaux dont elle peut être chargée, ou les parties de terrains plus ou moins solides sur lesquels elle est posée.

Ces sortes de fondemens sont appelés pierrées, & se font de cette manière.

Après avoir creusé le roc d’environ sept à huit pouces, on borde les alignemens des deux côtés de l’épaisseur des fondemens, avec des cloisons de charpente, ensorte qu’elles composent des coffres dont les bords supérieurs doivent être posés le plus horizontalement qu’il est possible ; les bords inférieurs, suivant les inégalités du roc.

On amasse ensuite une grande quantité de menues pierres, en y mêlant si l’on veut les décombres du roc, lorsqu’ils sont de bonne qualité, que l’on corroie avec du mortier, & dont on fait plusieurs tas.

Le lendemain ou le surlendemain au plus tard, les uns le posent immédiatement sur le roc, & en remplissent les coffres sans interruption dans toute leur étendue, tandis que les autres le battent également par-tout avec la damoiselle, à mesure que la maçonnerie s’élève ; mais sur-tout dans le commencement, afin que le mortier & les pierres s’insinuent plus facilement dans les sinuosités du roc. Lorsqu’elle est suffisamment sèche, & qu’elle a déja une certaine solidité, on détache les cloisons pour s’en servir ailleurs.

Cependant, lorsque l’on est obligé de faire des ressauts en montant ou en descendant, on soutient la maçonnerie par les côtés avec d’autres cloisons ; & de cette manière, on surmonte le roc jusqu’à environ trois ou quatre pieds de hauteur, selon le besoin ; ensuite on pose d’autres fondemens à assises égales, sur lesquels on élève des murs à l’ordinaire.

Lorsque le roc est fort escarpé & que l’on veut éviter les remblais derrière les fondemens, on se contente quelquefois d’établir une seule cloison sur le devant pour soutenir la maçonnerie, & on remplit ensuite cet intervalle de pierrée comme auparavant.

La hauteur des fondemens étant établie, & arrasée convenablement dans toute l’étendue que l’on a embrassée, on continue la même chose en prolongeant,observant toujours de faire obliques les extrémités de la maçonnerie déja faite, jeter de l’eau dessus, & bien battre la nouvelle, afin de les mieux lier ensemble.

Une pareille maçonnerie faite avec de bonne