Page:Encyclopédie méthodique - Economie politique, T01.djvu/353

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commandé la culture des mûriers ; on a arrêté le débit des productions de l’agriculture & diminué le revenu des terres, pour favoriser des manufactures préjudiciables à notre propre commerce.

La Francepeut produire abondamment toutes

les matières de premier besoin ; elle ne peut acheter

de l’étranger que des marchandises de luxe ; le trafic mutuel entre les nations est nécessaire pour entretenir le’ commerce. Mais nous nous ;’ -sommes principalement attachés à la fabrication < Sc au commerce des denrées que nous pouvions tirer de l’étranger ; 8c, par’Un commerce de concurrence trop recherché, noús avons voulu nuire xà nos voisins’, 8c les priver du profit qu’ils retireraient de nous par la vente de leurs marchandises.

Par cette politique, nous avons éteint entr’eux & nous un commerce réciproque , qui étoit pleinement à notre avantage ; ils ont interdit chez vëux l’entrée de nos denrées, & nous achetons -d’eux, par contrebande & fort(cher, les matières que nous employons dans nos manufactures. Po,ur gagner’quelques millions à fabriquer & à vendre de belles étoffes, nous avons perdu des milliards sor k produit de nos terres , 8c ia na- "tion, parée d(t tissus d’or & d’argent, a cru jouir d’un commerce florissant.

Ces manufactures nous ent plongé dans un luxe désordonné, qui s’ést un peu étendu parmi les autres nations, 8c qui a excité leur émulation : nous les avons peut-être furpasséespar notre in- . dústrie ; ’mais cet avantagé a été principalement soutenu par notre propre consommation.

La consommation qui fé fait par les sujets, est la source des revenus du souverain, & la vente du superflu à l’étranger augmente ks richesses des sujets. La prospérité de l’état dépehddu concours de ces deux avantages : mais la consommation entretenue par le luxe est trop bornée ; elle ne peut se soutenir que par l’opuknce ; les hommes peu favorisés de la fortune, ne peuvent s’y livrer qu’à leur préjudice & au désavantage de l’état.

Le ministère plus éclairé fait que la consommation qui peut procurer de grands revenus au souverain , &.qui fait le bonheur de scs sujets, est ’, cette cpnsommation générale qui satisfait aux bé- • foins de la- vie. II n’y a que l’indigence qui puisse

nous réduire à boire de Peau, à manger de mauvais pain 8c à nous couvrir de haillons ; tous ks ’ hommes tendent parleus travaux à se procurer de -bons alimens 8C Ae bons vêtèbens : onyne pènt trop favoriser leurs efforts ; .çar- ce sont ks revenus du royaume, ks gains & ks ;dépenses Au peuple , ;quifpnt la richeffedu souverain, Les détails dans lesquels nous allons entrer fur les-revenus que peuvent procurer d abondantes -récoltes de grains & sor îa liberté dans le commerce de cette denrée , prouvera :suffisamment

! Combien îa production 

des’ matières de premier j besoin , leur débit 8c kur consommation intéresfenttous les états du-royaume, & fera juger de’ce que l’on doit aujourd’hui attendre des vues du gouvernement fur le rétablissements de Pagriculture. Nous avons, déja’ examiné Pétat de Fagriculi ture en France , les deux sortes de culture qui y . sont en usage , la grande culture ou celle qui se /fait avec des chevaux , & la petite culture qui’se ">-fait avec des boeufs, la différence des produits que donnent ces deux sortes de culture, les causes de la dégradation de notre agriculture, & ks moyens de la rétablir. Voyez l’article Fermier.

Nous avons vu que l’on cultive environ 36 millions d’arpens déterre , & que nos récoltes nous donnent, année commune ’, à-peu-près ^ millions de scptiers de bled ; savoir, n millions produits par la grande culture , & 34 millions par la petite culture [1]. Nous allons examiner le revenu que 45 millions de septiers de bled peuvent procurer au roi, conformément aux deux sortes de cultures qui les produisent : nous examinerons aussi ce qu’on retire par la dixme , pour k loyer des terres &pour le gain du cultivateur :, nous comparerons ensuite ces revenus avec ceux que produirait le rétablissement parfait de notre agriculture, Pexportation étant permise ; car, sans cette condition , nos ’récoltes qui ne sont destinées qu’à la consommation du"royaume, ne peuvent pas augmenter , parce que si elles étoient plus abondantes ,-elles feroient tomber lé bled en non valeur ; les cultivateurs ne pourraient pas en soutenir la culture, les terres neproduiroíent rien au roi ni aux propriétaires. II faudroit donc éviter Pabondance du bled dans un royaume où l’on n’en devroit recueillir que pour la subsistance de la nation. Mais , dans ce cas , les disettes font. inévitables ,. parce que, quand la récolte donné du bled pour trois ou quatre mois de plus que la consommation de I’année , il est à si bas prix que ce superflu ruine k laboureur, & néanmoins il ne soffit pas ppur la consommation de I’année suivante , s’il survient une mauvaise récolte : ainsi il n’y a que la facilité du débit à bon prix^ qui puisse maintenir Pabondance & k profit.

État de la grande culture des grains. La grande culture çst actuellement bornée à 6 millions d’arpens de terre, qui comprennent principalement les provinces de Normandie , dela Beauce, de Pisté de France, de ;la Picardie, de la Flandre françoise, du Hainault & peu d’autres. Un arpent de bonne terre, bien traité par la grande culture, peut produire 8 scptiers & davantage ; mesure de Paris, qui est 240 pesant ; mais toutes les terres traitées par cette culture ne font pas également fertiles ; car cette culture est plutôt pratiquée par un reste d’usage conservé dans

  1. Si les cultivateurs étoient assez riches pour traiter les trente six millions d’arpens par la grande culture, conformément aux six millions qui sont traités actuellement par cette culture, la récolte annuelle seroit d’environ soixante-six millions de septiers, au lieu de quarante-cinq millions, comme on va le prouver par l’examen de l’état actuel de la grande culture.