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insectes en général. Cette satisfaction, qu’on n’achète pas cher, qu’on est à portée de renouveller souvent, pour peu qu’on soit actif, trompe beaucoup de gens de bonne foi : ils pensent étendre les connoissances humaines en ajoutant au catalogue qu’on en a dressé, un être isolé, différent de ceux avec lesquels il a les rapports les plus intimes par quelques traits légers, quelques nuances indécises, à sensibles : ils ne font pas attention que des différences aussi peu importantes ne changent rien à la constitution & par conséquent à l’identité des espèces ; qu’avant d’avoir égard à ces traits si peu profonds, effets si ordinaires de tant de causes étrangères, & non de la constitution du mécanisme intime, il faudroit être assuré qu’ils n’ont pas été occasionnés par des circonstances dépendantes de la température de la saison, de la nourriture, du lieu de l’existence, &c. ; & que jusqu’à ce qu’on soit assuré qu’il ne faut pas rapporter à ces causes si probables, si fréquentes, les traits superficiels qui différencient certains individus d’autres insectes en qui on remarque les mêmes parties constituantes, essentielles, constantes & indépendantes des circonstances, il ne faut regarder les individus qui offrent ces distinctions que comme des variétés & non des espèces ; les mêmes personnes ne paroissent pas non plus assez persuadées que ce n’est pas la longueur de la liste sur laquelle nos connoissances & nos possessions sont inscrites, qui nous rend plus savans ou plus riches ; mais que nous ne sommes l’un & l’autre qu’autant que le catalogue est correct & qu’il énonce des objets réels. Qu’est-ce en effet que des connoissances fictices & des possessions chimériques ? Mais ne critiquons personne ; si ce qui nous paroît le plus raisonnable, & que nous proposons comme tel, l’est en effet, il sera adopté & suivi ; ce sera le produit du tems. Sans imiter donc ni le commun des hommes qui foulent les insectes aux pieds, ni ceux qui, par quelque motif que ce soit, leur accordent une admiration, une valeur qu’ils ne méritent pas, tâchons de reconnoître ce qu’ils sont en eux-mêmes ; quels sont leur extérieur, leur constitution & leur organisation ; comparons-les sous ces rapports aux autres animaux ; reconnoissons en quoi ils en diffèrent & ce qui les distingue réellement entr’eux.

§. I.er
De l’extérieur & de la forme des insectes.

Les insectes sont en général plus petits que les autres animaux que nous appercevons aisément. Car je n’entends pas parler, soit des insectes, soit des animaux d’autres genres que nous ne découvrons qu’à l’aide du microscope, que cet instrument nous offre par-tout & dans routes les substances ; soit que ses rapports soient toujours fidèles, soit qu’ils nous induisent en erreur.

Il y a cependant quelques insectes plus grands que certains oiseaux & certains poissons, sans parler des vers ; tels sont ces grands scarabès, ces grosses araignées, qu’on nous apporte des contrées méridionales de l’Amérique ; le scarabœus actéon, le prionus gigantœus, l’aranœa avicularia, sont d’un volume cinq, six fois, peut-être d’avantage, au-dessus de celui de certains oiseaux, mouches & de l’ablette ; mais ce sont des exceptions rares. Il n’en est pas moins vrai qu’en général les insectes sont plus petits que les autres animaux, & qu’ils en diffèrent par ce premier trait.

Un caractère qui les en éloigne davantage, c’est leur forme ; elle ne ressemble & ne peut être au premier aspect comparée à celle d’aucun animal ; ils paroissent conformés sur un modèle particulier. C’est cette différence générale dans tout leur extérieur, avec les autres animaux, qui fait que l’homme qui n’a jamais étudié l’histoire des insectes, reconnoît sans hésiter, pour tels, tous ceux qui s’offrent à sa vue, tandis que le naturaliste est fort embarrassé à déterminer ce qui convient à un animal, pour qu’on doive le placer parmi les insectes ; ce qui vient de ce que le premier juge d’après l’ensemble & tout l’extérieur, tandis que le second ne s’attache qu’aux seuls traits qu’il nomme