Page:Encyclopédie méthodique - Histoire naturelle, 5, Insectes 2, A-Bom, T4.djvu/194

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différens états & les avoir classés, examine leurs parties tant externes qu’internes, l’organisation & les fonctions de ces différentes parties ; il décrit en troisième lieu les habitudes des insectes, leurs procédés dans leurs différens états ; il fait connoître les avantages que nous retirons de ces animaux, les torts qu’ils nous causent, & les moyens de les prévenir ou d’y remédier. Le plan de M. de Réaumur renferme donc tout ce que doit contenir l’histoire d’un animal ; savoir, les caractères qui le distinguent, son organisation, ses habitudes, les avantages qu’il nous procure, le tort qu’il nous fait, le moyen de l’empêcher ou d’y remédier. Ce plan suivi & exécuté, offriroit une histoire complette des insectes. M. de Réaumur a senti que ce ne pouvoit être que le produit du tems & de l’observation, qu’il falloit amasser des matériaux, & laisser à ceux qui vivroient dans les tems où ils seroient rassemblés à les mettre en ordre, à donner l’histoire générale des insectes. L’exécution de ce travail exige, pour première condition, qu’on connoisse & qu’on distingue entr’elles les différentes espèces d’insectes ; on ne peut être conduit à ce but & y atteindre qu’à la faveur d’une méthode au moyen de laquelle on classe & on reconnoisse tous les insectes en général. M. de Réaumur n’a pas rempli cette première condition ; il ne se l’étoit pas même proposée ; mais depuis son travail, M. Linné, Geoffroy, Fabricius, ont exécuté cette première partie du plan. La seconde seroit la connoissance de l’organisation des insectes. Swammerdam, Vallisoièry, Malpighi y ont beaucoup donné de soin, & l’ont fort avancée ; M. de Réaumur a profité de leurs travaux, & s’en est beaucoup aidé ; on peut regarder cette partie comme fort avancée ; car la nature de la chose ne comporte pas qu’on entre dans des détails pour tous les genres d’insectes ; il suffit qu’on connoisse l’organisation des insectes qui composent les premières divisions de la méthode générale de classer ces animaux. La troisième condition, nécessaire pour une histoire complette des insectes, seroit la connoissance des habitudes de toutes les espèces. C’est encore une partie pour laquelle les généralités suffisent, parce que les habitudes les plus importantes sont les mêmes pour toutes les espèces subordonnées aux grandes divisions des méthodes. Quoique M. de Réaumur ait profité des observations des naturalistes qui l’avoient précédé, il a beaucoup ajouté à leur travail sur les habitudes des insectes ; il a de même augmenté les connoissances sur les avantages & les torts dont les insectes sont les auteurs. J’ajouterai à ce que je viens d’exposer, que la plupart des insectes dont M. de Réaumur s’est occupé, sont des insectes de notre climat, & qu’il a aussi traité de quelques insectes étrangers. On peut conclure de tout ce qui vient d’être observé sur son travail, qu’il est à la fois méthodique, sans comprendre une méthode générale, anatomique & historique, que par conséquent il comprend toute l’étendue dont l’histoire des insectes est susceptible ; mais il la comprend d’une manière incomplette, non pas par la faute de l’auteur, mais par le manque de connoissances, d’observations & de faits recueillis dans le tems où il écrivoit. On lui doit d’avoir recueilli des faits épars, des observations peu connues consignées dans des ouvrages étrangers & peu lus en France ; ce service est particulièrement relatif à la patrie de l’auteur ; il a aussi beaucoup contribué à y inspirer le goût de l’étude des insectes, négligée avant lui, & même méprisée par l’effet du préjugé, soit sur l’origine des insectes, soit sur le peu d’influence qu’on leur accordoit sur les autres productions de la nature, & le peu de place qu’on pensoit qu’ils occupoient dans son ouvrage ; M. de Réaumur a singulièrement augmenté les connoissances relatives aux habitudes des insectes, aux avantages que nous en retirons, au tort qu’ils nous font ; il a cherché les moyens de les rendre plus utiles, ceux de prévenir leurs ravages ou d’y remédier ; mais ces derniers objets, qui n’avoient pas été remplis par ceux qui l’avoient précédé, ont aussi échappé à ses efforts, ainsi qu’à ceux des savans qui ont depuis suivi cette utile partie de ses travaux.