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liberté des mouvemens n’auroit plus lieu. L’acier eſt préférable, parce que la ſolidité peut ſe concilier avec l’aigu de la pointe dans une tige d’acier bien préparée & trempée convenablement. La pointe d’un pivot étant bien polie, faite avec ſoin, & bien placée dans la ligne verticale, comme l’axe du pivot, l’aiguille éprouve moins de frottement, le pivot ne touchant la chape que dans un point ſenſible, & ſes mouvemens ſont libres : alors l’aiguille n’obéit qu’à l’impreſſion magnétique. On eſt aſſuré de la grande mobilité d’une aiguille, & conſéquemment de la perfection de la ſuſpenſion, lorſque cette aiguille, miſe en mouvement ſur ſon pivot, exerce un grand nombre de vibrations (cent & plus, par exemple,) avant de s’arrêter ; & lorſque les aiguilles ſe fixent toujours au même point, après que leurs vibrations ont ceſſé, dans pluſieurs épreuves faites ſucceſſivement.

Quelques-uns emploient le cuivre, ou plutôt le laiton, pour former des pivots ; mais il faut alors qu’il ſoit bien écroui, & paſſé à la filière ; ſans cela il ſeroit trop mou, & la pointe s’émouſſeroit. Il y en a qui donnent la préférence au cuivre ſur l’acier, pour les pivots, par la raiſon que le fluide magnétique de l’aiguille ne ſe diſſipe pas par un pivot en cuivre comme par un pivot en fer ; mais cette raiſon ne me paroît pas plauſible, parce qu’il n’eſt pas prouvé qu’un corps aimanté perde ou diminue de magnétiſme, lorſqu’il eſt ſur un ſupport ferrugineux, & parce qu’une aiguille aimantée qui a une chape de cuivre, de laiton, ou d’agate, n’eſt point en contact avec ſon pivot d’acier, & conſéquemment ne peut éprouver une diſſipation de fluide magnétique, en ſuppoſant qu’elle fût réelle dans les circonſtances de l’hypothèſe qu’on a avancée gratuitement.

D’autres terminent par une pointe d’acier le bout ſupérieur du pivot, lorſqu’il eſt en cuivre. Le fondement de cette pratique eſt que le frottement du cuivre, ſur un métal de même eſpèce, eſt plus capable de diminuer le mouvement que le frottement d’une eſpèce de métal ſur une autre eſpèce, par exemple, du cuivre ſur le fer. Le principe eſt vrai ; mais l’application qu’on en fait ici, me paroît plutôt déduite de la théorie que de la pratique ; car il n’y a pas d’expérience qui prouve que, lorſqu’il s’agit d’un très-petit contact, comme de celui de la pointe d’un pivot ſur la chape d’une aiguille, la liberté des mouvemens ſoit ſenſiblement moindre quand une chape de cuivre roule ſur un pivot de même matière, que dans le cas où elle eſt ſur un pivot d’acier.

Les pivots d’acier ont un inconvénient majeur, c’eſt qu’ils peuvent ſe rouiller, ſur-tout dans des vaiſſeaux qui ſont ſur l’eau, & ſouvent environnés de bitumes & de vapeurs épaiſſes. Or, la rouille, ſi la pointe du pivot la contractoit, nuiroit bien plus fortement à la liberté des mouvemens de l’aiguille, que le frottement d’une eſpèce de métal ſur un métal de même ſorte.

Pour remédier à cet inconvénient, il faut donc préférer le cuivre ou le laiton à l’acier dans la conſtruction des pivots, & ſe ſervir d’une chape d’agate ou d’un métal mixte ; alors on évitera le frottement de deux métaux homogènes, ſi on craint que cela nuiſe à la perfection de la ſuſpenſion. M. Michell propoſe de faire le pivot en or ou en argent ; & alors il eſt à propos de rendre ces métaux durs par beaucoup d’alliage.

Lorſque les appareils, qui renferment des aiguilles aimantées, ſont portatifs, il eſt bon que les pivots puiſſent ſe démonter ; on les porte alors dans des tuyaux de plume, ou d’autre matière : rien n’empêche d’avoir pluſieurs pivots dans les voyages, en cas que les pointes s’émouſſent. Au lieu d’ôter le pivot, il y en a qui adaptent à leur boîte un petit levier à fourchette & à baſcule qui ſert à élever l’aiguille de deſſus le pivot, pour empêcher qu’elle ne frotte deſſus, lorſqu’on ne s’en ſert point. Il y en a cependant qui blâment cet uſage, parce que l’aiguille ne peut alors ſe diriger librement vers les pôles. Mais les mouvemens du tranſport ſont plus nuiſibles encore à l’aiguille ; & de deux maux il faut éviter le plus grand.

La forme la plus ordinaire des pivots eſt celle d’une petite tige perpendiculaire, qui, par le haut, finit en pointe, & ſur laquelle on place l’aiguille par la cavité conique de ſa chape. F G, figure 339, & P G, figure 359, montrent des pivots d’aiguille.

Cette manière de ſuſpendre les aiguilles ſuffit peut-être pour les inſtrumens le plus en uſage ; mais ſi l’aiguille a un volume & un poids plus grand que de coutume, ce qui eſt quelquefois néceſſaire pour augmenter la vertu magnétique, & conſéquemment la propriété directive, alors la ſuſpenſion ordinaire entraîneroit trop de frottement. Une aiguille petite & mince ne contracte pas autant de force magnétique pour ſe diriger, que celle qui a plus de volume & plus de maſſe, ainſi que l’expérience le prouve ; & celle-ci peſant davantage ſur la pointe du pivot, n’a pas autant de liberté de mouvement, à cauſe de ſon excès de frottement.

Afin de rendre une aiguille aſſez peſante, autant & même plus libre dans ſes mouvemens qu’une aiguille très-légère, M. Antheaulme imagina de ſubſtituer au pivot aigu, dont nous venons de parler, un petit pilier de cuivre aſſez gros pour recevoir une chape de verre ou d’agate qui y eſt maſtiquée, l’ouverture tournée en haut. Il en ajuſta enſuite une ſemblable au centre de l’aiguille. Après cela il mit un petit fuſeau de cuivre pointu par les deux bouts, dont l’un entre dans la chape renverſée qui eſt à l’extrémité du pilier, & l’autre dans la chape de l’aiguille. Enfin, du milieu de la hau-