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CHAPITRE XXII.

et de ma douleur, et qu’elle avait gardé le silence ?… »

Il appuya ses deux mains contre son front tout pâle. La pente de ses souvenirs l’entraînait.

— Oh ! je l’aimais !… murmura-t-il d’une voix tremblante ; vingt années se sont écoulées depuis lors, et je n’ai jamais aimé une autre femme !… J’ai supplié Dieu de m’envoyer l’oubli !… Dieu ne m’a point exaucé… Je l’aime encore… je l’aime !… Cette nuit, je suis devenu fou rien qu’en écoutant une histoire où je ne sais quelle femme jouait un rôle qui pouvait ressembler à sa vie…

« Et maintenant que je vous parle, j’attends comme un pauvre insensé… J’ai entrevu un vague espoir dans la nuit de mon avenir… Si je m’étais trompé !… si elle avait souffert, elle aussi, comme j’ai souffert !…

« J’attends pour savoir si je dois vivre, ou m’endormir dans la fatigue qui m’accable… »

Il se tut. Cyprienne et Diane l’écoutaient encore.

Il y avait en elles une émotion puissante et grave qui les faisait muettes.

L’un des noirs entr’ouvrit la porte de la chambre.

— Une lettre pour milord, dit-il.