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LES BELLES-DE-NUIT.

— Quand les vivants le voudront, prononça-t-il lentement, le mort se rendormira.

Tout le monde, cependant, glissait vers le grabat des regards effrayés.

Comme si le vieux Benoît eût voulu protester contre cette menace, on le vit s’agiter entre ses draps, puis se lever sur son séant.

— C’est aujourd’hui !… dit-il d’une voix creuse ; voilà bien des jours et bien des nuits que j’attendais ce moment !… La main de Dieu est sur moi… je ne verrai pas le retour de Penhoël !

Tout le monde gardait un silence glacé. Robert lui-même, malgré sa forfanterie, ne trouvait pas le courage d’ouvrir la bouche.

— J’avais compté mes heures, reprit le vieillard ; je savais bien que la maladie n’aurait pas le temps de me tuer… Je l’avais dit… je l’avais dit !… L’étranger était venu par un déris… dans une nuit sombre… c’est dans une nuit sombre et par un déris qu’il devait revenir !… Penhoël ! Penhoël ! celui qui tuera ton corps et ton âme va me prendre ma vie mortelle !

Son souffle râlait. Chacune de ses paroles tombait sourde et pénible.

Il n’y avait pas dans la cabane une seule poitrine qui ne fût oppressée.

— Qui donc a laissé ouvertes les portes du