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Page:Féval - Madame Gil Blas (volumes 1 à 4) - 1856-57.djvu/44

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dente. Que s’était-il passé, là, tout près de moi ! J’entr’ouvris la porte et j’écoutai au dehors. Aucun pas ne résonnait sur la grande route. La Noué devait encore être loin. Je passai sous la serpillière et je m’avançai jusqu’au lit. Des brins de paille grincèrent sous mes pieds nus. Je portai vivement la main à la paillasse. Elle était éventrée. Quelque chose de froid était sous mon pied. Je me baissai : c’était un écu de cinq francs.

La Noué poussa la porte au moment où je repassais sous la serpillière. Je n’ai jamais éprouvé une plus grande terreur en ma vie. Il y avait de quoi.

Elle ne me vit point, et je pus regagner le chevet du bonhomme.

Elle alluma la chandelle en chantonnant. Je la devinais ivre.

Quand la lumière brilla, je vis son visage d’un rouge sombre qui me sembla plus effrayant. Elle tenait un litre d’eau-de-vie sous le bras.

— Avance, faignante ! me dit-elle ; je suis de bonne humeur… je veux te soûler ce soir.

Elle me versa au moins une demi-écuellée d’eau-de-vie.

— Marraine, répondis-je en tremblant, j’ai été malade toute la journée.

— Ah ! fit-elle en haussant les épaules, malade !… Est-ce que je suis jamais malade, moi ?… Je n’aime plus le poiré chaud ; c’est trop fade… je vas boire ta part.