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Page:Féval - Madame Gil Blas (volumes 1 à 4) - 1856-57.djvu/46

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La nuit était noire ; la campagne était déserte. Il pouvait bien être déjà onze heures du soir.

Je l’entendis qui pensait tout haut :

— S’il lui était arrivé malheur !

Elle rentra précipitamment et courut droit au lit. — Ah ! fit — elle avec un commencement d’angoisse, il a emporté son bonnet de nuit !

Mes dents claquèrent. Je songeais à la paillasse.

En effet, presque aussitôt après, elle poussa un cri si sauvage que le bonhomme se dressa galvanisé.

Elle venait d’apercevoir le trou de sa paillasse.

Elle la saisit et la jeta au milieu de la chambre comme si c’eût été une plume.

La paillasse, en tombant, rendit un son sourd.

— Volée ! volée ! s’écria-t-elle, échevelée déjà et les yeux sortis de la tête.

Elle ne fit qu’un bond jusqu’à moi, et son poing fermé m’écrasa le visage tandis qu’elle râlait :

— Tu m’as volée !… volée !

J’étais presque évanouie. Je n’avais pas la force de parler. Mais je voyais et j’entendais. Je la vis prendre la hachette au coin du foyer, et je l’entendis qui disait :

— Il faut que je fasse un malheur !

Je donnai mon âme à Dieu, car cette femme était une folle furieuse.

Mais au moment où elle revenait, la hache