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Page:Féval - Madame Gil Blas (volumes 1 à 4) - 1856-57.djvu/54

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PAR PAUL FÉVAL

Il me reprit par la main, et nous franchîmes le fossé de la route. Il voulait tourner le hameau. Nous passâmes derrière ce cher petit bosquet d’ormes où avaient lieu nos rendez-vous d’autrefois.

— Ah ! Suzanne, coquinette ! murmura-t-il tandis que je lui montrais les ormes en riant et en pleurant, tu étais déjà une petite femme ! tu avais des secrets pour moi.

— Mon parrain, répondis-je, je n’en aurai plus ; pardonne-moi !

Allant toujours à travers champs, nous atteignîmes le sommet de la côte. J’allai droit à ma motte de gazon que je soulevai. Gustave resta tout ébahi à la vue du tas de gros sous qui était là dedans. Il y avait pour plus de soixante francs de pièces de billon. C’était presque sa charge.

Comme nous étions occupés à nouer cette fortune dans une de ses chemises, un chant grave et lointain monta jusqu’à nous. C’était l’abbé Daudet qui venait lever le corps du bonhomme Lodin. Nous reconnûmes les principaux de Saint-Lud, Guéruel en tête. Gustave et moi nous nous mîmes à genoux et nous priâmes avec ferveur.

Quand la procession se remit en marche vers la chapelle, nous vîmes la Scholastique marcher derrière le corps.

Nous restâmes à genoux tant que le cortège fut en vue.

— Elle est ma sœur, dit Gustave ; que Dieu lui pardonne !