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Page:Féval - Madame Gil Blas (volumes 1 à 4) - 1856-57.djvu/58

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PAR PAUL FÉVAL

— Qu’as-tu donc ? dis-je, déjà troublée de son trouble.

— C’est que… me répondit-il en hésitant, je ne sais pas comment on fait dans les auberges…

Il ne connaissait donc pas tout, ce grand Gustave ! Je me sentis prendre de l’importance.

Les jeunes filles n’éprouvent pas au même degré ces étranges défaillances des jeunes hommes aux premiers pas dans la vie.

— Viens toujours, mon parrain, lui dis-je d’un ton où il y avait déjà de la protection ; — nous ferons comme nous pourrons.

Il me fallut le prendre par la main et presque l’entraîner.

Le seuil de l’auberge était élevé de trois ou quatre marches au dessus du niveau de la route. La salle commune où se faisait la cuisine était très vaste et contenait les lits de la famille, deux par deux, l’un sur l’autre. Cette salle était presque pleine au moment où nous entrâmes. Il y avait là une quinzaine de maquignons et marchands de bestiaux qui revenaient de la foire de Bernières.

Ils étaient assis par groupes autour de la grande table étroite et longue qui tenait toute la largeur de la salle.

Les bonnets de coton se montraient en majorité, mais il y avait aussi quelques chapeaux de cuir. Deux ou trois femmes faisaient partie de la réunion, qui était bruyante à étourdir un sourd. Rien au monde ne peut donner l’idée du tapage