Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/181

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fixé sans retour ; j’étais destiné à être esclave pour la vie. Il fallait dans ce cas-là m’attendre à subir la punition la plus sévère, et à être privé pour toujours des moyens de prendre la fuite. Il n’était pas nécessaire d’avoir une imagination bien vive pour me figurer les scènes effrayantes qui me menaçaient si j’avais le malheur d’échouer. Les horreurs de l’esclavage et les charmes de la liberté étaient toujours présents à mon esprit. C’était pour moi la mort ou la vie. Cependant je restais inébranlable dans ma résolution. Enfin, le 3 septembre 1838, je pris la fuite et je parvins à arriver à New-York sans rencontrer le moindre obstacle. Quant à la manière dont je m’y pris, — à la direction que je suivis, — aux moyens de transport dont je fis usage, — il faut que j’en fasse un mystère, car les raisons énoncées plus haut me forcent au silence.

On m’a souvent demandé quels sentiments j’avais éprouvés en me trouvant enfin dans un état libre. Je n’ai jamais pu répondre à cette question d’une manière qui m’ait satisfait moi-même. Tout ce que je puis dire, c’est que je n’ai jamais senti d’émotion plus profonde. Je peux comparer mes transports de joie à ceux d’un marin sans armes qu’un pirate poursuivait, et qui vient d’être délivré