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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

maux qualifiés de hideux et traités en ennemis, je vous ai fait reconnaître de précieux auxiliaires, de véritables hirondelles de nuit adonnées à l’extermination des insectes crépusculaires. La raison apportant ses lumières au sein des ténèbres du préjugé, la bête détestable s’est trouvée animal fort utile. Je vais essayer pareillement de vous faire démêler le faux et le vrai dans l’histoire de ces autres maudits, les reptiles. Commençons par les serpents.

Si, pour expliquer notre aversion pour les chauves-souris, nous pouvons invoquer leur configuration qui nous répugne par son étrangeté, nous ne trouvons pas dans les serpents les mêmes motifs de répulsion. Leur forme svelte ne manque pas d’élégance, la souplesse de leurs mouvements onduleuxTête de couleuvre. Tête de vipère.
Tête de couleuvre. Tête de vipère.
est gracieuse à la vue ; leur peau écailleuse est ornée de couleurs franches, qui plaisent par leur symétrie. Notre aversion a son origine ailleurs. Quelques serpents sont venimeux, ils sont armés d’un redoutable engin de mort. Certes, ce n’est pas avec ceux-là que je veux vous réconcilier ; s’il ne dépendait que de moi de leur écraser la tête à tous, bien volontiers j’en délivrerais la terre. D’autres, beaucoup plus nombreux, sont dépourvus de toute espèce d’appareil venimeux, et de la sorte sont parfaitement inoffensifs, à moins qu’ils ne soient de taille à nous nuire par leurs seules forces musculaires, ce qui n’est pas rare dans les pays chauds de l’équateur, mais ne se présente jamais dans nos pays, où le plus gros serpent ne pourrait résister aux efforts mêmes d’un enfant. Ainsi les uns sont excessivement à craindre à cause de leur venin ; les autres, du moins ceux de nos contrées, ne nous font courir aucune espèce de danger. D’habitude, cette distinction fonda-