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être appréhendé au hasard : il y va de la vie du chasseur, qui marquerait son coup en mordant à l’aventure. La nuque seule est vulnérable au degré voulu. Il faut saisir l’adversaire par là et non autre part. Ce serait l’irriter et le rendre plus dangereux que de ne pas le terrasser sur-le-champ. L’Aranéide le sait très bien. À l’abri sur le seuil de sa porte, et prompte, s’il le faut, à la retraite, elle épie donc le moment favorable ; elle attend que le gros hyménoptère se présente de face, la nuque facile à happer. Si cette condition de succès se présente, elle bondit et opère ; sinon, lassée des turbulentes évolutions du gibier, elle rentre. Et voilà pourquoi, sans doute, il m’a fallu deux séances de quatre heures pour assister à trois meurtres.

Instruit jadis par les hyménoptères paralyseurs, j’avais cherché à produire moi-même la paralysie en inoculant une gouttelette d’ammoniaque dans le thorax des insectes, Charançons, Buprestes, Scarabées, dont la concentration du système nerveux se prête à cette opération physiologique. L’élève avait convenablement répondu à l’enseignement des maîtres, et je paralysais un Bupreste et un Charançon presque aussi bien que le ferait un Cerceris. Pourquoi n’imiterais-je pas aujourd’hui l’expert tueur, la Tarentule ? Avec une fine pointe d’acier, je fais pénétrer une très petite goutte d’ammoniaque à la base du crâne d’un Xylocope ou d’une Sauterelle. À l’instant l’insecte succombe, sans autres mouvements que des convulsions désordonnées. Atteints par l’âcre liquide, les ganglions cervicaux cessent leurs fonctions et la mort arrive. Cependant cette mort n’est pas soudaine, les convulsions durent quelques temps. Si l’expérimentation laisse quelque peu à désirer sous