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POUR QU’ON LISE PLATON

Il n’y a rien de plus platonicien, sous des apparences physiologiques, scientifiques et techniques, que les trop courts propos d’Eryximaque dans le Banquet.

Avec la théorie de l’amour considéré comme besoin d’immortalité et de l’amour considéré comme besoin d’union entre les contraires, l’une confirmant l’autre, du reste, on ferait facilement, ce qui serait, je crois, la véritable théorie de l’amour.

Je dis : l’une confirmant l’autre ; car le besoin d’union entre les contraires est complémentaire, pour ainsi parler, du besoin d’immortalité. Si les contraires s’attirent, c’est qu’ils sentent, avertis par un instinct secret, par la suggestion du « génie de l’espèce », que rien, plus que cette union des contraires, n’est favorable à la génération, et aussi à la santé de la race, et par conséquent à la perpétuité, qui est le but cherché.

Trouve-t-on trop métaphysique et par conséquent pure rêverie cet « instinct secret » et cette intervention du « génie de l’espèce ? » D’abord je répondrai que le mot « génie de l’espèce » n’est pas autre chose que le nom métaphysique et trop littéraire de l’instinct et qu’il est difficile de nier l’instinct et la sûreté de prévision de l’instinct ; et il n’est pas plus étrange que les contraires s’atti-