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POUR QU’ON LISE PLATON

des trois Anticyres pour la guérir. Quand tu me parles, donc, du désir des honneurs et de la gloire chez l’artiste, tu ne t’aperçois pas que tu le rabaisses… je t’étonne, mais je suis ici un peu pour cela et la science est fille de l’étonnement… que tu le rabaisses au degré des politiciens, des sophistes et des rhéteurs, pour lesquels je crois que tu n’as qu’une estime extrêmement modérée.

— Sans doute ; mais le désir de la gloire et des honneurs est différent chez le politicien et chez l’artiste.

— Pas autant que tu le crois ; car c’est aux mêmes hommes que l’un et l’autre demandent honneur et gloire et des mêmes hommes qu’ils les attendent, et si le désir de gloire est plus inoffensif chez l’artiste, il est aussi mauvais au fond, procédant des mêmes sentiments et du même état d’esprit et d’âme.

— Il se pourrait ; mais je crois que je n’ai pas bien dit, tout à l’heure, concevant confusément, et je te prie d’appliquer ton art à accoucher un peu mon esprit avec ta dextérité habituelle.

— Mais je le veux bien, quand bien même en me le demandant tu te moquerais un peu de moi, ce que j’ai toujours permis, à charge de revanche. Quand tu as parlé d’honneur et de gloire, sais-tu de quoi, en vérité et au fond, tu parlais ? Tu parlais