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POUR QU’ON LISE PLATON

a toujours été s’affaiblissant, ce qui vient, selon moi, de ce que les rois ayant donné des bornes trop étroites à la liberté de leurs sujets et ayant porté leur autorité jusqu’à la tyrannie, ont ruiné par là l’union et la communauté d’intérêts qui doit régner entre tous les membres de l’Etat. Cette union une fois détruite, les princes, dans leurs conseils, ne dirigent plus leurs délibérations vers le bien de leurs sujets et l’intérêt public ; ils ne pensent qu’à agrandir leur domination et il ne leur coûte rien de renverser les villes et de porter le fer et le feu chez des nations amies, lorsqu’ils croient qu’il leur en reviendra le moindre avantage. Comme ils sont cruels et impitoyables dans leurs haines, on les hait de même ; et quand ils ont besoin que les peuples s’arment et combattent pour leur défense, ils ne trouvent en eux ni concert ni ardeur à affronter les périls. Quoiqu’ils mettent sur pied des millions de soldats, ces armées innombrables ne leur sont d’aucun secours pour la guerre. Réduits à prendre des étrangers à leur solde, comme s’ils manquaient d’hommes, ils mettent dans ces mercenaires tout l’espoir de leur salut. Outre cela, ils sont contraints d’en venir à un tel point d’extravagance qu’ils proclament par leur conduite que ce qui passe pour précieux et estimable chez les hommes n’est rien au prix de l’or et de l’argent…