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POUR QU’ON LISE PLATON

reconnaissant que le citoyen, s’il se sent lésé par ses nourrices au point d’avoir la tentation de les battre, a toujours le droit de changer de patrie ; et de cette façon nous serons essentiellement et régulièrement conservateurs, non pas conservateurs par passion, par archaïsme, par régressions capricieuses, mais par sentiment précis et inscrit quelque part de la continuité de la cité.

Cet esprit de conservation, qui n’est pas autre chose que le patriotisme même, car le patriotisme a ceci de particulier qu’il se saisit dans le passé et non, ou beaucoup moins, dans le présent, doit présider à toutes choses, aux ouvrages littéraires, aux ouvrages poétiques, aux arts, aux jeux, qui sont des arts populaires. Les innovations des poètes, des musiciens, des organisateurs de jeux sont des malheurs publics ; parce que ce sont et des signes et des causes de mépris à l’égard du passé, c’est-à-dire de mépris à l’égard de la patrie même.

Cette législation conservatrice sera toute pénétrée de moralité et même tâchera de ne pas être autre chose que la moralité elle-même. Elle interdira le meurtre et le vol, comme toutes les législations humaines[1], en tenant compte, pour le

  1. Avec d’assez curieuses distinctions. Si un enfant blesse son père ou sa mère avec préméditation, il sera puni de mort ; si