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POUR QU’ON LISE PLATON

Cette idée, si discutée, il faut surtout la comprendre exactement. Par cette caste communiste, Platon a surtout et même uniquement songé à confier la garde et la défense de la cité à un ordre monastique. Il a pensé que la cité ne pouvait être défendue avec désintéressement que par un ordre faisant vœu de pauvreté et même d’absence de tout bien et renonçant aux joies et aux douceurs du foyer et delà famille. Il a voulu créer, au service de l’Etat, une Eglise armée.

L’Eglise catholique n’a pas fait, au fond, autre chose pour la défense de la foi que ce que Platon institue pour la défense et la protection de la

    Etat bien gouverné, tout doit être commun, les femmes, les enfants, l’éducation, les exercices… » — Mais d’abord il faut se souvenir que Platon pensant que l’Etat idéal, irréalisable, sciait en effet l’Etat de communauté absolue, il lui arrive ici et là — très rarement — de se souvenir secrètement de cette idée et de dire de l’Etat tout entier ce qu’il ne pense pratiquement que des guerriers ; et ensuite il faut lire de près tout le chapitre v de la République, qui est celui où il organise pratiquement l’aristocratie de son Etat ; il faut lire surtout la partie de ce livre où il donne les raisons pourquoi la communauté des biens et des femmes est nécessaire aux guerriers, et l’on verra bien que, très nettement, il a restreint la communauté des biens, des femmes et des enfants aux guerriers seuls, et pour des raisons qui, ne s’appliquant qu’aux » gardiens de l’Etat », qu’à ceux qui ont pour mission de défendre et de protéger la République, montrent assez, par cette restriction même, que ce n’est qu’à la caste guerrière que Platon, eu définitive, juge bon d’imposer ce régime.