Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/144

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au jeu l’argent comptant de ma dot. Son bien étant déjà surchargé d’hypothèques, il vouloit se procurer de nouvelles ressources pour ses plaisirs, en vendant une petite terre qui m’appartenoit : ce qu’il ne pouvoit faire sans mon consentement ; et l’unique motif de sa feinte tendresse, étoit d’obtenir de moi cette faveur.

« Je la lui refusai net. Je lui dis, et c’étoit la vérité, que si j’avois possédé, au commencement de notre mariage, tous les trésors du monde, il auroit pu en disposer sans réserve ; que j’avois toujours eu pour maxime, que la fortune d’une femme devoit suivre le don de son cœur ; mais que puisqu’il avoit jugé à propos, depuis long-temps, de me rendre la liberté de l’un, j’étois décidée à conserver le peu qui me restoit de l’autre.

« Je ne vous peindrai point la fureur où le jetèrent ces mots, et l’air résolu dont je les prononçai. Je ne vous fatiguerai pas non plus du récit de la scène qui s’ensuivit entre nous. Vous jugez bien que l’histoire de la maîtresse n’y fut point oubliée ; elle y figura avec tous les ornements que la haine et le mépris surent y ajouter.

« M. Fitz-Patrick parut abasourdi du coup. Je ne l’avois jamais vu si déconcerté. Ses idées, d’ordinaire assez confuses, se brouillèrent tout-à-fait. Il ne chercha point à se justifier, il adopta un