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pas imaginé un si odieux artifice, dans la vue de me maltraiter.

« Mais j’abrège des détails fastidieux et je cours au dénoûment. Après de nombreuses altercations, dans lesquelles ma cousine embrassa chaudement ma défense, M. Fitz-Patrick la chassa de chez lui. Quand il vit que ni les caresses, ni les menaces ne pouvoient triompher de ma résistance, il prit contre moi un parti violent. N’allez pas croire pourtant qu’il me battît. Peu s’en fallut, à la vérité : mais il ne s’emporta pas jusque-là. Il se contenta de m’enfermer dans ma chambre, sans me laisser ni plume, ni encre, ni papier, ni livres. Une servante venoit tous les jours faire mon lit, et m’apportoit à manger.

« Au bout d’une semaine, il me visita dans ma prison, et du ton d’un magister, ou plutôt d’un tyran, il me demanda si j’étois disposée à céder. Je lui répondis avec fermeté que j’aimerois mieux mourir. — « Eh bien, vous mourrez, et que le diable vous emporte, s’écria-t-il, car vous ne sortirez pas vivante de cette chambre. »

« J’y restai encore une quinzaine. À ne vous rien taire, ma constance étoit presque à bout et je songeois à me soumettre, lorsqu’un jour, en l’absence de mon mari, qui n’étoit sorti que pour peu de temps… ; par une faveur inespérée du ciel, il arriva un événement… Au moment où