Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/185

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« Ah ! monsieur, s’écria Partridge, plût au ciel que vous voulussiez suivre mon conseil !

— Pourquoi ne le suivrois-je point ? Peu m’importe désormais en quel lieu je porte mes pas, et ce qu’il adviendra de moi.

— Eh bien, monsieur, mon avis est qu’à l’instant vous fassiez volte-face, et repreniez le chemin du logis. Quand on peut, comme votre seigneurie, retourner dans une bonne maison, faut-il courir les champs en vagabond ? Je vous demande pardon ; sed vox ea sola reperta est[1].

— Hélas ! je n’ai pas de maison où je puisse retourner… Mais quand mon protecteur, mon père consentiroit à me recevoir chez lui, aurois-je la force de supporter la vue des lieux où ma Sophie n’est plus ? Cruelle Sophie !… Ah ! que dis-je ? je ne dois accuser que moi de mon malheur… Non, c’est toi plutôt qui en es cause. Maudit sois-tu, butor ! imbécile ! c’est toi qui m’as perdu. Si je m’en croyois, je t’arracherois la vie. »

À ces mots il saisit Partridge au collet, le secoua rudement, et lui causa une émotion si violente, que jamais accès de fièvre ou terreur panique ne lui en avoit fait éprouver une pareille.

Partridge, glacé d’effroi, se jeta aux genoux

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