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durement, en lui disant que chaque paroisse devoit prendre soin de ses pauvres.

« Eh quoi ! Partridge, s’écria Jones en riant, n’êtes-vous pas honteux, avec tant de charité dans la bouche, d’en avoir si peu dans le cœur ? Votre religion, je le vois, ne vous sert qu’à excuser vos défauts ; elle ne vous excite nullement à la vertu. Un vrai chrétien peut-il refuser d’assister un de ses frères, dans une situation si misérable ? » En même temps il prit sa bourse, et donna un schelling au mendiant.

« Mon maître, dit le pauvre homme après l’avoir remercié, j’ai dans ma poche une chose curieuse que j’ai trouvée à environ deux milles d’ici. Vous plairoit-il de l’acheter ? Je me garderois de la montrer à tout le monde ; mais vous me paroissez si bon, si charitable pour les malheureux, que vous ne soupçonnerez pas un homme d’être un voleur, par la seule raison qu’il est pauvre. » Alors il tira de sa poche un petit portefeuille doré qu’il présenta à Jones.

Jones l’ouvrit sur-le-champ, et devinez, lecteur, ce qu’il éprouva, lorsqu’il aperçut, à la première page, les mots Sophie Western écrits de la main de sa belle maîtresse. Il couvrit ce nom de baisers, et ne put contenir la vivacité de ses transports, malgré la présence de son compagnon et du mendiant. Peut-être aussi ces transports mê-