Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le moyen de le lui remettre. « Je connois, dit-il au mendiant, la dame qui a perdu le portefeuille, et je vais faire tous mes efforts pour la trouver et pour le lui rendre le plus tôt possible. »

Ce portefeuille, sorti de la boutique d’un fameux tabletier, étoit le dernier présent de mistress Western à sa nièce. Il avoit coûté vingt-cinq schellings ; mais la valeur réelle de l’argent contenu dans l’agrafe, n’étant que d’environ dix-huit pences, le marchand ne l’auroit pas repris pour un penny de plus, quoiqu’il fût encore comme neuf. Une personne moins délicate que Jones, profitant de l’ignorance du pauvre, se seroit contentée de lui offrir six pences, ou un schelling ; bien des gens même ne lui auroient laissé que son droit de trouvaille ; et dans sa triste position, il auroit pu, au jugement d’habiles procureurs, le faire valoir en vain.

Notre héros, naturellement généreux, pour ne pas dire prodigue, lui donna sans balancer une guinée. Le pauvre, qui depuis long-temps ne s’étoit vu en possession d’un pareil trésor, le combla de bénédictions, et montra presque autant de joie que Jones en avoit témoigné, en lisant le nom de Sophie Western.

Nos voyageurs le prièrent de les mener à l’endroit où il avoit trouvé le portefeuille. Il se prêta volontiers à leur désir, et les y conduisit, mais