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armes contre cinquante mille ? À coup sûr il n’y a qu’un fou, je vous en demande pardon ; oui, tout homme qui a mens sana in corpore sano[1]… »

Jones interrompit cette tirade d’éloquence inspirée par la peur, et dit à son compagnon, pour l’encourager, que le tambour annonçoit le voisinage de quelque ville, et marcha droit au lieu d’où partoit le bruit, en l’assurant qu’il ne l’exposeroit à aucun danger, et que les rebelles ne pouvoient être si près d’eux.

Ces dernières paroles calmèrent un peu la frayeur de Partridge. Quoiqu’il eût beaucoup mieux aimé prendre une direction contraire, il suivit notre héros. Son cœur, plein d’une émotion inconnue aux braves, battoit à l’unisson du tambour, dont le son ne cessa qu’au moment où, sortant de la plaine, ils entrèrent dans une étroite cavée.

Partridge qui marchoit du même pas que Jones, aperçut alors à quelques toises de distance un lambeau de toile peinte flottant dans l’air. Il s’imagina que c’étoit le drapeau ennemi, « Ô ciel ! monsieur, s’écria-t-il, les voici. Je reconnois la couronne et le cercueil. Ô ciel ! je n’ai jamais rien vu de si terrible ! ils ne sont plus qu’à une portée de fusil de nous. »

Jones leva les yeux et découvrit aussitôt d’où

  1. Un esprit sain dans un corps sain.