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aperçu tout de suite, quoique je n’en eusse rien témoigné. »

L’hôte appuya cette dernière observation, et réclama le mérite de l’avoir faite de son côté. « Rien, dit-il, n’est plus vrai. Il n’y a qu’un fou qui ait pu songer à quitter une maison comme la mienne, pour aller courir les champs au milieu de la nuit. »

Le commis de l’accise ôta sa pipe de sa bouche, et dit que l’air et le langage du jeune homme lui avoient paru fort extraordinaires, puis s’adressant à Partridge : « S’il est fou, ajouta-t-il, pourquoi le laisse-t-on en liberté ? il peut être cause de quelque malheur. On devroit s’assurer de lui, et le reconduire chez ses parents. »

Partridge rouloit dans sa tête la même idée. Il pensoit que Jones s’étoit enfui de chez M. Allworthy, et se figuroit que l’écuyer le récompenseroit généreusement, s’il parvenoit à lui ramener le jeune fugitif. Toutefois, l’emportement et la force physique de notre héros, qu’il connoissoit par expérience, l’avoient détourné jusque-là d’un dessein dont il jugeoit l’exécution impossible. Mais à peine le commis de l’accise eut-il exprimé son sentiment, qu’il se hâta d’y joindre le sien, et témoigna le plus vif désir qu’on pût venir à bout de l’entreprise.

« En venir à bout ? répéta le commis, rien n’est plus facile.