Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/250

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votre offre pour quelques minutes, et j’ai avec moi deux compagnons qui seront fort aises d’obtenir la même faveur. » Elle leur fut accordée de meilleure grace qu’ils ne la reçurent. Partridge auroit mieux aimé endurer les injures de l’air, que de se mettre à la merci de gens qu’il prenoit pour des esprits. Le guide se sentoit retenu par la même inquiétude. Cependant ils suivirent Jones, bon gré mal gré, l’un parce qu’il n’osoit quitter son cheval, l’autre parce qu’il craignoit de demeurer seul.

Dans un siècle superstitieux, nous aurions moins tardé, par pitié pour nos lecteurs, à bannir de leur esprit l’effrayante idée de voir apparoître sur la scène Belzébuth ou Satan, avec son hideux cortége ; mais ce genre de croyance étant tombé de nos jours dans un grand discrédit, nous n’avons pas craint de leur causer de pareilles terreurs. Depuis long-temps les poëtes de théâtre se sont approprié tout l’appareil du ténébreux empire. Ils semblent même le négliger aujourd’hui, comme un ressort usé, qui n’est propre qu’à émouvoir la galerie du cintre, où nous supposons que peu de nos lecteurs vont se placer.

Cependant, si nous croyons ne leur avoir inspiré aucune peur des esprits infernaux, nous appréhendons d’exciter en eux, sans le vouloir, une autre espèce d’alarmes : c’est qu’ils ne nous