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prêtent le dessein de faire un voyage dans le pays des fées, et de mêler aux personnages de cette histoire des êtres à l’existence desquels personne n’a jamais eu la simplicité de croire, quoique bien des gens aient eu la folie de s’amuser à écrire ou à lire leurs aventures.

Pour prévenir des soupçons si préjudiciables à la réputation d’un historien qui fait profession de puiser tous ses matériaux dans la nature, nous dirons, sans plus de préambule, quels étoient ces inconnus dont la soudaine apparition avoit glacé d’effroi Partridge, consterné le guide, et surpris même un peu notre héros.

Les individus rassemblés dans la grange, n’étoient autres qu’une troupe d’Égyptiens, vulgairement nommés Bohémiens, qui célébroient les noces d’un de leurs compagnons. À en juger par la joie empreinte sur tous les visages, ils paraissoient jouir d’un bonheur parfait. Leur réunion offroit plus d’ordre et de décence que n’en présente souvent une fête de village. Car ils sont soumis à un gouvernement régulier, ils ont des lois de leur façon, et obéissent à un magistrat suprême, auquel ils donnent le nom de roi.

La grange étoit abondamment pourvue de provisions. On ne remarquoit nulle recherche dans l’apprêt des viandes, et l’appétit des convives n’en exigeoit point. Il y avoit une grande