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Sur sa réponse affirmative, sa majesté bohémienne dit au mari : « Je suis fâché de voir qu’il existe un bohémien assez vil pour trafiquer de l’honneur de sa femme. Si vous aviez aimé la vôtre, vous auriez prévenu son crime, au lieu d’y prêter les mains, pour avoir ensuite le droit de l’accuser. Je vous défends de prendre l’argent de cet étranger ; vous méritez un châtiment, et non une récompense. J’ordonne de plus qu’en punition de votre infamie, vous portiez sur le front, durant un mois, une paire de cornes ; que votre femme soit traitée de prostituée et montrée au doigt pendant le même temps ; car si vous êtes un Bohémien infâme, elle est aussi une infâme prostituée. »

Les Bohémiens procédèrent aussitôt à l’exécution de la sentence, et laissèrent Jones et Partridge seuls avec sa majesté. Jones applaudit à l’équité du jugement. « Vous paroissez surpris, lui dit le monarque. Vous aviez, je le suppose, une fort mauvaise opinion de nous. Peut-être nous preniez-vous tous pour des voleurs ?

— J’avoue, repartit Jones, qu’on ne rend pas aux Bohémiens la justice qu’ils semblent mériter.

— Voulez-vous que je vous dise, répliqua le roi, la différence qu’il y a entre vous et nous ? mes sujets volent vos compatriotes, et vos compatriotes se volent les uns les autres. »