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le garde, au lieu de le rendre au propriétaire connu, ne mérite pas moins, in foro conscientiæ[1], d’être pendu, que s’il l’avoit volé. Ce billet appartient à ma chère maîtresse. Il a été en sa possession. Rien ne me déterminera à le remettre en d’autres mains que les siennes. Oui, je le lui rendrai, quand je serois, comme toi, en proie à une faim dévorante, et que je n’aurois pas d’autre moyen de l’apaiser. J’espère m’acquitter de ce devoir avant la fin du jour. En tout cas, je te défends, sous peine d’encourir ma disgrace, d’offenser de nouveau mon oreille par la proposition d’une si détestable bassesse.

— Je me serois gardé de vous la faire, si elle m’avoit paru telle. Assurément une mauvaise action me répugne autant qu’à qui que ce soit ; mais peut-être en savez-vous plus que moi. J’aurois pu croire cependant que je n’avois pas vécu tant d’années, et enseigné si long-temps la grammaire, sans être en état de distinguer le fas du nefas[2] ; mais il paroît que nous devons passer notre vie à nous instruire. Mon vieux maître d’école, qui étoit un grand savant, avoit, je m’en souviens, coutume de dire : Polly matete cry

  1. Dans le for intérieur.
  2. Le juste de l’injuste.