Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/278

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flatter, non l’esprit, mais la vanité d’un riche patron. Docile à tes leçons, la comédie prend un air grave et sérieux, tandis que la tragédie tonne, éclate, et glace d’épouvante les spectateurs qu’elle assourdit. La docte histoire t’endort par d’ennuyeux récits, et le roman inventif te réveille par l’attrait d’aventures surprenantes. Ton libraire joufflu se ressent de ta bénigne influence. C’est grace à tes conseils que le pesant in-folio dépecé avec une heureuse industrie, après avoir dormi long-temps sur des tablettes poudreuses, circule rapidement de main en main dans tout le royaume ; que certains livres en imposent au monde, comme les charlatans, par des titres pompeux, ou éblouissent les yeux, comme les petits-maîtres, par l’éclat de leur parure. Viens, déesse au teint fleuri, garde pour d’autres tes inspirations ; mais offre-moi tes séduisantes récompenses, ton sonore et brillant métal ; tes billets de banque payables à vue, feuilles légères chargées d’invisibles trésors : joins à ces dons une demeure agréable et commode, une abondance toujours nouvelle, enfin une bonne part dans l’héritage de cette mère bienfaisante, dont le sein fertile fourniroit une nourriture plus que suffisante à la totalité de sa nombreuse famille, si la majeure partie n’en étoit privée par la voracité de quelques membres trop