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auroit bientôt découvert l’habitation du lord, si celui-ci n’en eût changé par malheur en partant pour l’Irlande. Récemment établi dans un nouvel hôtel, il n’avoit pas encore eu le temps d’étourdir ses voisins du fracas de son équipage. Après une infructueuse recherche qui dura jusqu’à onze heures du soir, Jones cédant aux conseils de Partridge, se retira dans Holborn, à l’auberge du Taureau, où il étoit descendu, et il y goûta ce doux repos que procure d’ordinaire une extrême fatigue.

Le lendemain il se remit de bonne heure en quête de Sophie, et avec aussi peu de succès que la veille. À la fin pourtant, soit que la fortune se relâchât envers lui de sa rigueur, soit qu’il ne fût plus en son pouvoir de le tromper, il entra dans la rue honorée de la résidence du lord. On lui indiqua son hôtel, et il frappa un petit coup à la porte.

Cette façon modeste de s’annoncer inspira d’abord au portier une médiocre idée de la personne qui se présentoit ; il n’en jugea pas mieux à la vue de Jones vêtu d’un habit de bure, ayant à son côté l’épée qu’il tenoit du sergent, et dont la lame, bien que de fin acier, n’avoit qu’une poignée de cuivre, encore étoit-ce de cuivre très-peu brillant : aussi, quand Jones demanda la jeune dame arrivée la veille avec milord, on lui