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à elle-même, elle se dégagea doucement de ses bras, et pour détourner la conversation d’un sujet trop douloureux et trop tendre, elle lui demanda, (ce qu’elle n’avoit pas encore songé à faire,) comment il se trouvoit dans ce salon ? Il commençoit à bégayer une réponse qui, selon toute apparence, auroit excité les soupçons de Sophie, quand tout-à-coup lady Bellaston entra.

Elle fit quelques pas en avant. À la vue de Jones et de Sophie ensemble, elle s’arrêta ; puis un moment après, recouvrant un admirable sang-froid : « Mistress Western, dit-elle d’un air et d’un ton de voix qui pourtant trahissoient encore sa surprise, je vous croyois à la comédie. »

Sophie n’avoit pas eu le temps d’apprendre comment Jones étoit parvenu à découvrir sa demeure. Elle ignoroit que lady Bellaston et lui se connussent : aussi fut-elle peu embarrassée de répondre. Elle le fut d’autant moins, que lady Bellaston, dans les divers entretiens qu’elle avoit eus avec elle sur les motifs de sa fuite, avoit toujours paru ne douter en rien de sa franchise et donner entièrement tort à son père. Elle lui conta donc sans hésiter l’histoire du désordre qui étoit survenu à la comédie, et qui l’avoit obligée de précipiter son retour.

La longueur de ce récit donna le loisir à lady