Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/363

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roïne suivit la maxime de l’illustre Shaftsbury. Convaincue que lady Bellaston ne connoissoit point Jones, elle résolut de l’entretenir dans cette ignorance, quoiqu’il dût lui en coûter un petit mensonge.

Dès que Jones fut sorti : « Voilà, sur ma parole, dit lady Bellaston, un honnête et beau jeune homme. Je voudrois bien savoir qui il est, je ne me souviens pas de l’avoir jamais vu.

— Ni moi non plus, madame, répondit Sophie. Il faut convenir qu’il a fait preuve d’une grande probité, en me rapportant mon billet.

— Oui, et convenez aussi qu’il a bien bon air ; n’êtes-vous pas de mon avis ?

— Je n’y ai pas fait grande attention, madame : il m’a plutôt paru gauche et embarrassé.

— Vous avez parfaitement raison. On voit à ses manières qu’il n’a pas fréquenté la bonne compagnie. Je dirai plus : malgré son empressement à vous rapporter votre billet, et son refus d’accepter une récompense, je doute presque qu’il soit un homme bien né. J’ai toujours observé dans les gens comme il faut un air de noblesse qu’il est impossible aux autres d’acquérir. J’ai quelque envie de lui faire fermer ma porte.

— Cependant, madame, après sa conduite on ne peut soupçonner… D’ailleurs, si vous y avez fait attention, vous avez dû remarquer dans son