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offrir un meilleur garant de ma constance, un garant irrécusable.

— Quel est-il ? lui demanda Sophie un peu étonnée.

— Je vais vous le montrer, s’écria Jones en la prenant par la main et la conduisant devant une glace. Ange du ciel, voyez cette charmante figure, ces traits divins, cette taille enchanteresse, ces yeux où brille une si belle ame. L’heureux possesseur de ces trésors pourroit-il être inconstant ? Non, ma Sophie, non, tant d’attraits fixeroient le cœur le plus volage. Vous n’en douteriez pas, si vous pouviez vous voir avec d’autres yeux que les vôtres. »

Sophie rougit et ne put s’empêcher de sourire ; puis reprenant un air grave : « Si je dois juger de l’avenir par le passé, dit-elle, mon image ne restera pas plus dans votre cœur, quand vous cesserez de me voir, que dans cette glace quand je serai hors de la chambre.

— Par tout ce qu’il y a de sacré au monde, par le ciel même, votre image n’est jamais sortie de mon cœur. La délicatesse de votre sexe, en amour, ne peut concevoir la grossièreté du nôtre, et combien le sentiment a peu de part dans certaines liaisons.

— Jamais, répondit Sophie avec dignité, je n’épouserai un homme qui n’aura pas assez de