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Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 2, 1909.djvu/171

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LA PLANÈTE MARS.

Voyons maintenant comment ces déductions théoriques s’accordent avec les faits observés. Ceux qui sont familiarisés avec l’aspect télescopique de Mars peuvent être induits peut-être, en lisant ce qui précède, à supposer que je n’ai fait qu’adapter ma théorie aux faits connus. Ma réponse est simplement que je ne puis guère éviter cette apparence, qui résulte nécessairement de ma théorie si elle est exacte ; mais je vais plus loin.

Plusieurs hypothèses ont été présentées pour expliquer les phénomènes martiens : elles diffèrent toutes de la mienne. Elles supposent une plus grande quantité d’atmosphère que mes calculs ne l’indiquent ; elles disent que le climat et la météorologie de Mars correspondent d’une manière très satisfaisante à ceux de la Terre. Je maintiens que ces conditions diffèrent tellement qu’aucune des créatures de notre monde ne saurait vivre sur Mars. Ces théories parlent de neige et de pluie, tandis que la mienne infirme l’existence de ces météores aqueux. Elles ont beaucoup de mal à expliquer le climat, qui donne à ces prétendues taches neigeuses d’hiver une étendue moindre que celle de notre Terre. Mon calcul de la densité atmosphérique fait table rase de cette difficulté et explique tous les phénomènes comme n’en étant que des conséquences inévitables sans hypothèse de chaleur interne, ou autre particularité, en dehors naturellement de la densité atmosphérique calculée.

Les paragraphes suivants d’un Mémoire du professeur Phillips dans les Proceedings of the Royal Society, du 26 janvier 1865, éclaircissent quelques-unes de ces différences. L’auteur dit :

« Les distances relatives au Soleil de Mars et de la Terre étant prises comme 100 et 152, l’influence solaire relative doit être sur Mars comme 100 et 231 sur la Terre ; de sorte que l’on doit s’attendre à ce que la surface de la planète soit dans un état de gelée perpétuelle et non à une température agréable de 4° à 10°, ou même de 10 °C., analogue à celle que possède la Terre prise dans son ensemble. Comment nous expliquer ce phénomène ? De deux influences concevables auxquelles on pourrait avoir recours, c’est-à-dire une chaleur interne très élevée de la planète, et quelque particularité de l’atmosphère, nous pouvons, tout en assignant une valeur à chacune, adopter sans hésitation la dernière, comme étant plus immédiate et effective… Tracer les effets en détail serait impraticable ; mais, en général, nous pouvons remarquer que, comme une diminution de la masse d’atmosphère vaporeuse autour de la Terre exagérerait beaucoup la différence de température diurne et nocturne, estivale et hivernale, l’effet contraire s’ensuivrait comme corollaire de l’argumentation. Appliquant ce raisonnement à Mars, nous verrons que son atmosphère étendue réduirait l’écart de température entre l’été et l’hiver comme entre le jour et la nuit. Elle augmenterait, en outre, la température moyenne, cette atmosphère donnant libre accès aux rayons solaires, s’opposant au retour de la chaleur obscure de la surface terrestre et empêchant sa radiation dans l’espace. Cet effet a lieu actuellement sur la Terre, qui est rendue plus chaude et plus égale en température par l’atmosphère que si cette atmosphère n’existait pas. Il est concevable qu’il