Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/395

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moins bas, sont plus raides et plus carrés ; les miséricordes elles-mêmes ne signifient rien, elles sont sculptées plus lourdement et leur rangée est terminée aux quatre coins par de gros Amours qui ont le ventre tendu comme des hydropiques. Au fond, en face de la chaire de l’évêque et collée au mur, se dresse une grande Naïade les cheveux en arrière et présentant l’abdomen dans un mouvement de croupe à la Bacchante, incartade drolatique mise en face de Monseigneur pour le délecter un peu pendant l’office. Car j’imagine que l’homme qui s’asseyait dans cette chaire-là, au milieu de ces femmes nues, de ces Amours bouffis et de ces guirlandes sur lesquelles ils dansent, devait lire Marot plus que saint Augustin et faire ses petites heures d’Horace, à la mode des prélats du XVIe siècle qui avaient peur de gâter leur latinité en lisant l’évangile. Entre chaque miséricorde il y a alternativement, sur la partie la plus saillante, une jeune femme et une vieille : les premières sont belles, de face pure, et vous regardent avec une sécurité impudente ; les secondes sont maigres et furieuses et tiennent le milieu entre la sorcière et la harpie.

L’église Saint-Étienne se compose de deux parties, deux nefs ajustées ensemble, avec un angle à gauche comme deux bâtons l’un au bout de l’autre et mal attachés ; la première est romane, la seconde est gothique. Le chœur est de la Restauration, de même qu’à Castelnaudary. L’église Saint-Michel a un portail gothique, masqué par