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Page:Fonsegrive - Art et pornographie, 1911.djvu/25

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art et pornographie

dernier livre comme une « lecture troublante » qui doit « éveiller toutes les visions lascives de l’Orient » ou d’ailleurs, je suis fixé ; il l’annonce et le proclame lui-même : eût-il du talent, c’est un simple pornographe, il spécule sur les « troubles » et sur les « lascivités » pour débiter son produit. L’art n’a rien à faire avec ce commerce. Mais quand un artiste probe comme un Carpeaux, un Flaubert ou un Huysmans, livrent au public une œuvre sincère, toute pleine de vérité et de vie, et que cependant il paraît à peu près incontestable que l’œuvre n’aura guère sur le public que des effets immoraux, on ne peut s’empêcher d’être perplexe. Car, d’une part, l’artiste a fait œuvre d’art ; telle quelle, pas plus en elle-même que dans l’intention de l’artiste, l’œuvre n’est pas immorale, et cependant il est difficile, il est impossible qu’elle soit comprise par le public, elle est dangereuse, nuisible, socialement condamnable.

Voilà ce qu’il faut bien que les plus déterminés défenseurs de la liberté de l’art comprennent et consentent à entendre. Et c’est ici la source de la divergence que nous remarquions au début entre le discours du président de la Société des Gens de lettres et la pensée des ligueurs auxquels il venait s’unir. Dire d’une œuvre d’art qu’elle est immorale, pornographique, si l’on veut, la poursuivre et la condamner même, ce n’est pas toujours et nécessairement noter