Page:Fourier - Sur l'esprit irréligieux des modernes et dernières analogies 1850.djvu/21

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tituait les illusions. Rentrant en scène après de longs échecs, il se reforme dans le même ordre qui a causé sa défaite : veut-il courir à de nouveaux désastres ?

Il n’est aucune classe plus intéressée que les prêtres à réveiller l’espérance en Dieu, à prêcher l’épreuve du calcul de l’attraction et opérer avec la délivrance du genre humain leur propre délivrance, car il n’est pas aujourd’hui d’état plus disgracié que le leur, plus appauvri, plus réduit à d’humiliantes démarches pour obtenir une chétive subsistance. Il semble que la Providence ait voulu les frapper des mêmes peines, qu’ils [xxxxxxxxx], car le véritable enfer c’est la pauvreté. Nous applaudissons au jugement de Phalaris qui condamna l’inventeur d’un nouveau supplice à périr le premier par les tortures qu’il destinait à d’autres. Ainsi la classe sacerdotale a subi la première, et dès ce monde, les longs tourments dont elle menace le genre humain par la révoltante invention de l’enfer, l’une des principales causes de l’irréligion civilisée. Des barbares bien autrement religieux que nous, les musulmans, ne sont mus que par l’espoir des récompenses. L’enfer a chez eux si peu d’influence, qu’on n’en parle jamais dans leurs traditions religieuses, on n’y voit que des ressorts de séduction comme les charmes des houris, tandis que dans nos religions faites pour des nations plus sensées, on ne voit que détails de supplices épouvantables sans aucun détail de récompenses faites pour séduire. Faut-il s’étonner après cela des progrès de l’irréligion ?


III. avortement du ressort attractif chez les anciens
et les modernes.


La mythologie ne plongeait dans le Tartare que de grands coupables. Du reste elle n’était nullement alarmante sur le sort des âmes dans l’autre vie, et ne bannissait pas du séjour des bienheureux ceux qui avaient bien joui de celle ci. Nos dogmes suivent une marche opposée. Ils répandent sur l’autre vie des terreurs épouvantables, et veulent nous faire acheter par des austérités continuelles en ce monde une récompense non moins effrayante par le sort insipide promis aux élus du paradis chrétien.

On s’est étonné avec raison de ce que le christianisme ne donne aucune idée des délices de son paradis. Cette lacune a été si bien sentie, que divers écrivains ascétiques ont voulu y suppléer. J’ai lu parmi ces descriptions de paradis celle qu’on dit la plus brillante ; elle est de M. de Chateaubriand. J’y ai trouvé ce que je m’attendais à trouver, un paradis d’ordre simple, rien pour les sens principaux, rien pour les principales affections de l’âme. On peut gager que l’auteur même ne