Page:Francisco de Holanda - Quatre dialogues sur la peinture - 1548-1911.djvu/69

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DIALOGUE PREMIER 25

Lattanzio, à son tour, exprima son opinion en ces termes :

— « Les vaillants dessinateurs sont tellement jaloux de certains privilèges procédant de leur art qu’ils ne consentiraient à se troquer contre aucune autre espèce d’hommes, si grands soient-ils. Mais au moins leur conseillerais-je d’échanger leur sort contre celui des heureux, si je pensais qu’ils y voulussent consentir ou qu’ils ne s’estimassent les plus heureux des mortels.

« Un esprit capable d’exceller en la peinture sait bien où tendent et en quoi consistent la vie et les joies des hommes présomptueux ; comment ils meurent sans laisser de nom et sans avoir connu les choses dignes d’être connues et estimées en ce monde ; comment, enfin, de tels hommes ne peuvent se flatter d’être nés, pour tant d’argent qu’ils aient amassé en leurs coffres. Ainsi en arrive-t-il à comprendre qu’en une belle œuvre et en un renom de vertu immortel réside la félicité de cette vie, et que tout le reste n’est guère à souhaiter.