Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vie d’études ne nous arrêtera guère. Si les trois années qui vont suivre m’inspirent à l’heure qu’il est quelque intérêt, c’est un intérêt d’un autre ordre, où les sentiments du collégien n’entrent pour rien. Aussi, pour en finir avec ce genre insignifiant qu’on appelle un écolier, je vous dirai en termes de classe que je devins un bon élève, et cela malgré moi et impunément, c’est-à-dire sans y prétendre ni blesser personne ; qu’on m’y prédit, je crois, des succès futurs ; qu’une continuelle défiance de moi, trop sincère et très-visible, eut le même effet que la modestie, et me fit pardonner des supériorités dont je faisais moi-même assez peu de cas ; enfin que ce manque total d’estime personnelle annonçait dès lors les insouciances ou les sévérités d’un esprit qui devait s’observer de bonne heure, se priser à sa juste valeur et se condamner.

La maison de Mme Ceyssac n’était pas gaie, je vous l’ai dit, et le séjour d’Ormesson l’était encore moins. Imaginez une très-petite ville, dévote, attristée, vieillotte, oubliée dans un fond de province, ne menant nulle part, ne servant à rien, d’où la vie se retirait de jour en jour, et que la campagne envahissait ; une industrie nulle, un commerce mort, une bourgeoisie vivant étroi-