Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/164

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Le mariage avait été fixé pour la fin de l’hiver, et nous y touchions. Madeleine était sérieuse ; mais cette attitude toute de convenance ne laissait plus le moindre doute sur l’état de ses résolutions. Elle gardait seulement cette mesure exquise qui lui servait à limiter avec tant de finesse l’expression des sentiments les plus délicats. Elle attendait en pleine indépendance, au milieu de délibérations loyales, l’événement qui devait la lier pour toujours et de son propre aveu. De son côté, pendant cette épreuve aussi difficile à diriger qu’à subir, M. de Nièvres avait beaucoup plu et déployé les ressources du savoir-vivre le plus sûr unies aux qualités du plus galant homme.

Un soir qu’il causait avec Madeleine, dans l’entraînement d’un entretien à demi-voix, on le vit faire le geste amical de lui présenter les deux mains. Madeleine alors jeta un rapide regard autour d’elle, comme pour nous prendre tous à témoin de ce qu’elle allait faire ; puis elle se leva, et, sans prononcer une seule parole, mais en accompagnant ce mouvement d’abandon du plus candide et du plus beau des sourires, elle posa ses deux mains dégantées dans les mains du comte.

Ce soir-là même, elle m’appela près d’elle, et, comme si la netteté de sa situation nouvelle lui