Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/47

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on n’en voit pas souvent, comme on n’en a pas vu peut-être depuis vingt ans. Vous souvenez-vous, monsieur Dominique, il y a vingt ans ?… Ah ! quelles vendanges, quelle chaleur pour ramasser,… et que le raisin moûtait comme une éponge et qu’il était doux comme du sucre, et qu’on ne suffisait pas à cueillir tout ce que le sarment portait !… »

Dominique écoutait impatiemment, et son cheval se tourmentait sous lui comme s’il eût été piqué par les mouches.

« C’est l’année où il y avait tout ce monde au château, vous savez… Ah ! comme… »

Mais un écart du cheval de Dominique coupa la phrase et laissa le père Jacques tout ébahi. Dominique cette fois avait passé quand même. Il partait au galop et cinglait son cheval avec sa cravache, comme pour le corriger d’un vice subit ou le punir d’avoir eu peur. Pendant le reste de la promenade, il fut distrait, et garda le plus longtemps possible une allure rapide.

Dominique avait assez peu de goût pour la mer : il avait grandi, disait-il, au milieu de ses gémissements, et s’en souvenait avec déplaisir, comme d’une complainte amère ; c’était faute d’autres promenades plus riantes que nous avions adopté